Art néoclassique : David, Canova et les autres…
L’art au XVIIIe siècle (septième volet)… Au tournant du XVIIIe siècle et du XIXe siècle, le peintre Jacques-Louis David mène l’art néoclassique à son point d’orgue. Dans le domaine de la sculpture, Antonio Canova domine à Rome. Ces artistes revisitent de façon inédite les canons de l’Antiquité. Par ailleurs, les créateurs interprètent l’esprit néoclassique de différentes manières et les amateurs d’art deviennent influents… Morceaux choisis…
Par Maryse Marsailly (@blogostelle)
– Dernière mise à jour mai 2021 –

REPÈRES CHRONOLOGIQUES
Le XVIIIe siècle, en France : Louis XIV : 1638 – 1715. Régence de Philippe II, duc d’Orléans : 1715-1723 (minorité de Louis XV) – Louis XV : 1715 – 1774 – Louis XVI : 1774-1792 – Révolution Française 1789 – Première République. Convention : 1792-1795 (Robespierre, La Terreur 5 septembre 1793 – 28 juillet 1794) – Directoire : 1795 – 1799 – Consulat : 1799-1804 – Premier Empire : Napoléon Ier : 1804-1814.
LE “MANIFESTE” NÉOCLASSIQUE DE DAVID
Pour Denis Diderot, on doit peindre comme on parlait à Sparte… Avec Le Serment des Horaces, Jacques-Louis David peint un chef-d’œuvre, tel un “manifeste” de l’art néoclassique dans la peinture. Cette esthétique sobre et classique rompt définitivement avec les exubérances du style Rocaille de l’époque Louis XV…

David aspire au grand style…
Par ailleurs, Jacques-Louis David (1748-1825) aspire au grand style à la manière de Nicolas Poussin et de Charles Le Brun, deux grands maîtres de la peinture classique française du XVIIe siècle. L’artiste se rend à Rome, capitale de l’art antique…
En 1785, son tableau du Serment des Horaces achevé, le peintre le présente dans son atelier romain, avant de l’exposer à Paris, au Salon de l’Académie. David triomphe à Rome et à Paris grâce à ce premier chef-d’œuvre qui consomme une rupture totale avec la période Rocaille et qui consacre le nouvel art néoclassique…

David puise dans l’histoire romaine
Pour composer Le Serment des Horaces, un sujet de l’histoire romaine inspiré de la pièce classique de Corneille, Horace (1640), Jacques-Louis David utilise une géométrie très rigoureuse pour mettre en scène ses personnages et valoriser les éléments d’architecture.
L’ensemble de la toile repose sur des trilogies : trois arcades, trois combattants Horaces, trois épées, trois femmes. Ce tableau est la première commande royale du peintre, en 1784. Avec Le Serment des Horaces, le peintre met en lumière le stoïcisme, l’héroïsme et le patriotisme…


D’après Le Serment des Horaces, de Jacques-Louis David, détails des visages héroïques et des épées, 1784, huile sur toile, France, XVIIIe siècle, néoclassique. (Marsailly/Blogostelle)
Le thème héroïque du tableau évoque la guerre entre Rome et Albe. Afin de faire cesser les hostilités très meurtrières, chacune des deux cités se choisit ses champions. Rome désigne les Horaces et Alba les Curiaces, alors que ces deux familles sont alliées par plusieurs mariages…
Les Horaces, un style spartiate et sévère
Le peintre David représente les Horaces avant le combat, qui font le serment à leur père de vaincre ou de mourir pour leur patrie… À droite du tableau, les femmes (mère, sœurs et épouses) assistent à la scène, affligées et dans une douce attitude…
Face au duel à venir, les femmes n’écoutent que leur cœur… Apparaissent Sabine, sœur des Curiaces et femme de l’aîné des Horaces et Camille, sœur des Horaces, fiancée à un Curiace. Les deux jeunes femmes expriment leur profonde tristesse, l’une auprès de l’autre. Auprès d’elles, la mère des Horace enlace ses petits-enfants…

Les lignes souples, les doux coloris et les attitudes molles des femmes contrastent avec la raideur et la détermination héroïque des guerriers, exprimées par des lignes droites et des couleurs intenses qui, ainsi, s’apprêtent à honorer un duel quasi-fratricide…
Une savante et rigoureuse mise en scène
David peint des personnages grandeur nature, en petit nombre, et en groupes isolés clairement définis, dont la disposition rappelle celle des frises antiques des vases grecs et des sarcophages romains.
Dans une savante et rigoureuse mise en scène, l’artiste donne du relief à ses figures grâce à la lumière, dont l’effet s’apparente à un “coup de projecteur”… En outre, le peintre utilise une palette simple de coloris travaillés en aplats.

David, de Sénèque à Socrate…
Jacques-Louis David, Prix de Rome en 1774, reçu à l’Académie, souhaite débuter sa carrière en se distinguant radicalement. Ainsi, il renonce aux sujets galants et mythologiques de François Boucher, chantre de l’art Rocaille et son premier professeur…
Si on retrouve une touche rocaille et baroque dans le tableau La Mort de Sénèque, peint en 1773, dans La Mort de Socrate, composé en 1787, Jacques-Louis David insuffle véritablement un nouvel esprit classique… L’artiste trouve son inspiration dans l’histoire gréco-romaine et l’art de David répond aussi au souci de Denis Diderot, qui prône à la même époque une peinture morale…

Le Bélisaire de David, un tableau philosophique
Entre 1770 et 1800, l’histoire de Bélisaire (personnage historique du VIe siècle) est souvent représentée dans la peinture française. Cet engouement s’explique par la publication de Bélisaire, en 1767, un conte moral de Jean-François Marmontel (1723-1799), encyclopédiste et protégé de Voltaire qui va le défendre face à la censure…
Le roman de Marmontel relate les infortunes de Bélisaire, général populaire qui, au service de l’empereur byzantin Justinien, subit l’injustice de son souverain, jaloux de ses victoires militaires. Le tableau de David, Bélisaire demandant l’aumône, porte une inscription : Date obolum Belisario, ce qui signifie : Faites l’aumône à Bélisaire…

Dans le contexte social et politique de la fin du règne de Louis XV, ce récit philosophique permet à Marmontel de dénoncer le principe de la décision arbitraire, l’abus de pouvoir et le mépris de la valeur individuelle et du dévouement. Dès sa parution, l’ouvrage de Marmontel est censuré par la Sorbonne et condamné pour hérésie par l’archevêque de Paris…
Le mendiant Bélisaire de David
Au premier plan de la composition de David, apparaît le mendiant Bélisaire, qui se retrouve accusé à tort de complot contre l’Empereur. La légende relate que Justinien lui fait crever les yeux. Aveugle, Bélisaire doit se résoudre à mendier…
Mais, à l’arrière-plan de la toile, apparaît l’un des soldats qui avait combattu sous les ordres de Bélisaire et qui reconnaît son ex-général. L’œuvre de David illustre de manière exemplaire l’ingratitude des puissants et la fragilité de la bonne fortune de chacun…



D’après Bélisaire demandant l’aumône, de Jacques-Louis David, 1781, détails : le soldat reconnaît le général, l’aumône et l’inscription, France, XVIIIe siècle, néoclassique. (Marsailly/Blogostelle)
Les Amours de Pâris et Hélène pour le comte d’Artois
Par ailleurs, Jacques-Louis David peint Les Amours de Pâris et d’Hélène, pour le comte d’Artois (frère de Louis XVI et futur Charles X), en 1788. Un sujet tiré de la mythologie grecque, célèbre notamment grâce à L’Iliade et L’Odyssée du poète grec Homère.
Pâris, prince troyen, enlève Hélène, épouse du roi de Sparte, Ménélas. S’ensuit la guerre de Troie entre Grecs et Troyens. Jacques-Louis David impose un style de plus en plus sobre et classique, inspiré des modèles de l’Antiquité grecque…

Avec Les Sabines, David renouvelle la peinture d’histoire
Jacques-Louis David se distingue de Nicolas Poussin, auteur de L’enlèvement des Sabines, grand artiste peintre du XVIIe siècle qu’il admire, en peignant un épisode différent de cette histoire légendaire liée à la fondation de Rome. Nicolas Poussin : voir aussi l’article Vie d’Artiste : Qui êtes-vous Nicolas Poussin ?
Après l’enlèvement des Sabines par les Romains, les Sabins combattent pour les reprendre. David représente le moment où les Sabines, exhibant leurs enfants, font cesser le combat entre leurs époux romains (à droite) et leurs frères sabins (à gauche)…

Face à son épouse Hersilie, le roi de Rome, Romulus, retient le javelot qu’il s’apprête à lancer contre Tatius, roi des Sabins et père de Hersilie. Impressionnés par l’audace et le courage des Sabines, les combattants cessent les hostilités avant de finalement fraterniser…
Grâce à cette peinture d’histoire, il semble que David souhaite encourager la réconciliation des Français après les affres de la Révolution…
Précurseur, David présente Les Sabines dans son atelier…
Jacques-Louis David participe à la vie politique de son temps… Député, l’artiste siège à la Convention et figure parmi les fidèles partisans de Robespierre (lequel est guillotiné en 1794). David est alors emprisonné… Privé de sa liberté, le peintre réfléchit à un projet de tableau, Les Sabines, dont le sujet défend la réconciliation et la paix…

David achève sa toile cinq ans plus tard, en 1799. L’artiste considère cette composition comme son chef-d’œuvre. Il le présente de manière inédite dans son propre atelier du Louvre, lors d’une exposition indépendante et payante. David inaugure ainsi le principe des expositions privées, hors les salons officiels sous l’égide de l’Académie…
Les Sabines, la quête de l’esthétique grecque
Jacques-Louis David adhère aux préceptes de l’historien d’art allemand Johann Joachim Winckelmann, pour qui la sculpture grecque classique du IVe siècle avjc, atteint une forme de Beau idéal jamais dépassé depuis…

Théoricien de l’art Néoclassique, Winckelmann, exalte la noble simplicité et la calme grandeur de l’art Grec… De son côté, Denis Diderot défend l’idée que l’art peut éduquer et qu’il se doit de rendre la vertu attrayante et le vice odieux… Mais David est parfois critiqué pour son inspiration trop romaine par certains de ses élèves…
… parmi lesquels figure Jean-Auguste-Dominique Ingres. Ces jeunes artistes préfèrent un style plus archaïque. L’artiste y répond en réalisant un nouveau chef-d’œuvre inspiré cette fois par l’esthétique grecque.

Pour Les Sabines, David compose un univers moins spartiate, plus souple… Il représente des guerriers nus sur le modèle des statues grecques et travaille les drapés à la grecque.
Le peintre exploite aussi une composition en frise, sans recherche de profondeur, dans laquelle le dessin prédomine. Le peintre diffuse une lumière égale dans l’ensemble de son tableau et exploite une sobre palette de coloris simples travaillés en aplats.

Je veux faire du grec pur, déclare David…
Ainsi, le style des Sabines (1799) se distingue de celui du Serment des Horaces (1784), très romain, franchement spartiate et sévère. David aspire cette fois à la manière des grands artistes de l’Antiquité grecque : Je veux faire du grec pur, déclare David…
Par ailleurs, avec son Patrocle, Jacques-Louis David pousse sa recherche de l’idéal grec jusqu’à la perfection, exploitant une esthétique et un esprit purement néoclassiques…
CANOVA SUBLIME LA SCULPTURE NÉOCLASSIQUE
À la fin du XVIIIe siècle, la personnalité artistique d’Antonio Canova domine à Rome. Ce sculpteur réalise aussi des esquisses, des dessins et des peintures. Canova interprète de manière originale et inédite les canons de l’Antiquité qui motivent le choix de ses sujets… Il est parfois qualifié de Praxitèle moderne, en référence au sculpteur athénien Praxitèle, qui exerce dans la Grèce antique, au IVe siècle avjc…

La pureté d’Antonio Canova
Admis à l’Académie, Antonio Canova (1757 – 1822) se rend à Rome en 1779. Si l’art antique le laisse un temps indifférent, cet admirateur de l’art baroque découvre l’esprit néoclassique grâce à des amis, tels le peintre et antiquaire Gavin Hamilton et le graveur Volpato…
Canova se distingue par la grande sobriété de ses compositions, par une mise en lumière éblouissante de la nudité et par son traitement classique des drapés.
Cependant, l’artiste apporte une touche naturaliste à ses modèles antiques en travaillant sur des modèles vivants. Par ailleurs, Canova cultive une esthétique de la ligne pure, qui repose sur une finition extrêmement fine du marbre…



D’après Psyché ranimée par le baiser d’Éros, détails, d’Antonio Canova, 1793, marbre, XVIIIe siècle, France, néoclassique. (Marsailly/Blogostelle)
La Psyché de Canova ranimée par le baiser d’Éros
En 1793, Antonio Canova reçoit une commande d’un amateur anglais… mais son chef-d’œuvre achevé, Psyché ranimée par le baiser d’Éros, est finalement acquis par le général Joachim Murat (militaire, puis maréchal d’Empire de Napoléon).
Dans ce groupe sculpté, Canova interprète à sa façon l’histoire mythique d’Éros et de Psyché… Ce marbre, haut de 1,55 mètres sur 1,68 mètres de large, représente le dieu de l’Amour embrassant Psyché, personnification de l’âme humaine, pour qui il doit rester invisible. Grâce à son baiser, Éros sauve la vie de Psyché qui a respiré un parfum toxique…

Canova transcende les amours de Vénus et d’Adonis
Antonio Canova trouve son inspiration dans une peinture antique d’Herculanum, avec une bacchante et un faune. Mais l’artiste virtuose de Psyché ranimée par le baiser d’Éros se réfère aussi à l’une de ses propres œuvres, plus ancienne, Vénus couronnant Adonis.
Canova maîtrise parfaitement la science de la composition pyramidale, sublime la réminiscence classique, travaille à la perfection la sensualité du marbre et exploite le mouvement de la lumière. Ainsi, il transcende les amours de Vénus et d’Adonis…

La brillance et la volupté de la pierre
Pour ses sculptures de Vénus et d’Adonis, Canova tire encore son sujet de la mythologie gréco-romaine. Sur un groupe de marbre blanc, il représente Vénus retenant doucement son amant Adonis.
La déesse, très éprise de ce jeune mortel à la beauté exceptionnelle, va bientôt perdre son bien-aimé lors d’une chasse fatale pour lui… La finesse du polissage du marbre mène, là encore, à une brillance et à une volupté exceptionnelle de la pierre…
ÉROS ET PSYCHÉ PAR GÉRARD, ÉLÈVE DE DAVID
Psyché et l’Amour, de François Gérard
Le peintre François Gérard compose, en 1798, un tableau sur le thème de Psyché et L’Amour. Cet élève de Jacques-Louis David exprime dans son œuvre une évolution de l’art néoclassique, habité par une manifestation plus sensuelle des formes et une touche plus abstraite…
Comme chez le sculpteur Canova, les lignes sont épurées et idéalisées dans l’art de François Gérard qui, par ailleurs, exploite des couleurs simples et peint des figures au teint de porcelaine…

L’histoire mythique de Psyché est racontée par Apulée, auteur latin du IIe siècle apjc, dans son roman Les Métamorphoses ou L’Âne d’or, ainsi que par Jean de La Fontaine, au XVIIe siècle, dans Les Amours de Psyché et de Cupidon.
Psyché et Éros, une allégorie métaphysique
Sur le tableau de François Gérard un papillon – psyché en grec – volète au-dessus de la tête de la jeune femme et nous rappelle que le nom de Psyché est un symbole de l’âme.
En effet, l’histoire d’amour entre Psyché et Éros exprime aussi une allégorie métaphysique et initiatique : une série d’épreuves mène l’âme humaine à l’union avec l’Amour divin.



D’après Psyché et Éros, détail, drapés, visages et papillon, François Gérard, 1798, France, fin XVIIIe siècle, néoclassique. (Marsailly/Blogostelle)
La princesse Psyché reçoit chaque nuit la visite du dieu Éros, fils de Mars (grec Arès) et de Vénus (grec Aphrodite), très amoureux d’elle… Mais en aucun cas elle doit voir le visage de son amant. Pourtant, la jeune femme transgresse les lois divines en allumant une lampe.
Sur l’ordre de Vénus, jalouse de l’insolente beauté de Psyché, Cupidon, censé punir son aimée, s’enfuit. Vénus impose une série d’épreuves à Psyché… avant que, finalement, la jeune femme épouse son Cupidon et acquiert l’immortalité avec l’acquiescement de Jupiter (grec Zeus)…
UNE PALETTE NÉOCLASSIQUE VARIÉE
Au XVIIIe siècle, Rome reste un rendez-vous incontournable pour les Européens et les Américains. Néanmoins, si tous les artistes néoclassiques cultivent l’art d’une composition claire, le goût de la rigueur et le sens de l’idéalisation, chacun interprète pourtant ce retour à l’Antique à sa façon…

Un néoclassique décoratif, sensuel ou sévère
Parmi les artistes de l’art néoclassique, certains privilégient les effets décoratifs, tels les sculpteurs britanniques Thomas Banks et John Flaxman, tout en affirmant une originalité propre…
D’autres apportent de la sensualité à leurs sujets, comme le peintre français Joseph-Marie Vien, la Suisse Angelika Kauffmann, le sculpteur suédois Johan Tobias Sergel… Pour Joseph-Marie Vien, voir aussi l’article L’éclosion de l’esprit néoclassique et le retour héroïque du bel antique

Angelika Kauffmann, Raphaël parmi les femmes
Célèbre portraitiste de son temps, Angelika Kauffmann (Angelica Catharina Maria Anna Kauffmann, 1741-1807), voyage en Suisse, en Autriche et en Italie avec son père, le peintre Johann Joseph Kauffmann, qu’elle assiste dans la décoration d’églises.
Né en Suisse, Angelika Kauffmann vit à Rome, travaille pour les cours d’Italie, d’Allemagne et de Russie. L’artiste fréquente des intellectuels de son temps, tels les hommes de lettres allemands Goethe (Johann Wolfgang von Goethe) et Friedrich Gottlieb Klopstock…

En 1763, à l’occasion d’un premier séjour à Rome, Angelika Kauffmann rencontre Winckelmann dont elle fait un portrait… et sa carrière décolle. Cette artiste, admiratrice de Raphaël Mengs, devient membre de l’Académie de Saint-Luc à Rome, de l’Académie Saint-Clément à Bologne, des Académies de Florence et de Venise.
Qualifiée de Raphaël parmi les femmes, Angelika Kauffmann, qui expose jusqu’en 1797, relève le défi de la peinture d’histoire, un genre dominé par les artistes masculins… Comme tous les artistes néoclassiques, elle s’inspire de la culture gréco-romaine antique et de l’art de la Renaissance…
Par ailleurs, dans le domaine de l’art du portrait, l’artiste française Élisabeth Louise Vigée Le Brun fait le tour de l’Europe, au tournant du XVIIIe et du XIXe siècle… Voir aussi l’article Le fabuleux destin d’Élisabeth Vigée Le Brun…



Art du portrait. D’après Sarah Harrop en muse (Madame Bates), 1780-1781, d’Angelika Kauffmann, huile sur toile ; Anna Pitt en Hébé et Julie Le Brun en Baigneuse, 1792, huiles sur toile d’Élisabeth Louise Vigée Le Brun, ; XVIIIe siècle, néoclassique. (Marsailly/Blogostelle)
Héroïsme et tragédie chez Sergel
Johan Tobias Sergel (1740-1814), sculpteur et dessinateur suédois, séjourne à Rome entre 1767 et 1778. De passage à Paris (1778 – 1779), l’artiste réalise Le Spartiate mourant – un sujet tiré d’Hérodote – pour son morceau d’agrément à l’Académie royale, dont un modèle en plâtre est exposé au Salon de 1779.
L’esquisse en terre cuite de Sergel évoque l’héroïsme d’Othryadès qui, unique survivant d’un combat, met fin à ses jours pour ne pas survivre à ses compagnons tombés au combat. Le héros écrit en lettres de sang “j’ai vaincu” sur son bouclier…
D’après Le Spartiate Othryadès mourant, de Johan Tobias Sergel, 1779, esquisse en terre cuite, XVIIIe siècle, néoclassique. (Marsailly/Blogostelle)
Sergel s’inspire de la sculpture antique du Galate mourant du Capitole, à Rome, dit aussi Gladiateur mourant. Cependant, pour son Othryadès, empreint d’une certaine sensualité, l’artiste s’attache à donner de la nervosité à son travail de la terre cuite. Il accentue ainsi l’intensité tragique de la scène…
Flaxman sculpte la folie du roi Athamas
De son côté, le sculpteur John Flaxman représente la tragique fureur d’Athamas, roi de Thèbes. Ino et Athamas recueillent Dionysos et subissent la fureur de la déesse Héra qui les frappe de démence.
Pris de folie Athamas égorge son fils Léarque et Ino se précipite dans la mer avec son second fils Mélicerte. L’art de Flaxman se distingue par le traitement des drapés, dont l’ampleur décorative contraste avec l’attitude dramatique et paroxystique des personnages…

Austérité, vertu et sacrifice, version néoclassique…
Certains artistes néoclassiques se distinguent par leur austérité et le choix de sujets qui exaltent la vertu et le sacrifice, comme Jacques-Louis David, Jean François Pierre Peyron et l’Américain Benjamin West. Ces artistes ont une prédilection pour la mort héroïque, l’abnégation, la fidélité, le serment, la gloire, la fraternité…
Benjamin West immortalise le général James Wolfe
Benjamin West peint La Mort du général James Wolfe, commandant de l’expédition britannique qui s’empare de Québec en 1759. L’artiste met en lumière la noblesse de ce personnage, blessé et mourant entouré de ses hommes…
Ce peintre américain séjourne en Italie et à Rome où il s’initie au néoclassicisme de Raphaël Mengs et de Gavin Hamilton avant de s’installer en Angleterre…

Le groupe central peint par James Wolfe rappelle aussi le thème iconographique de la Pietà (Vierge tenant sur ses genoux le corps du Christ après la descente de croix). Ainsi, Benjamin West donne une aura spirituelle à la mort héroïque du général Wolfe…
Peyron peint l’héroïsme de l’amour conjugal
Autre sujet exemplaire de l’art Néoclassique, tiré de l’œuvre du tragédien Euripide (Ve siècle avjc), La mort d’Alceste, de Jean Francois Pierre Peyron (1744-1814)
Le peintre dépeint l’héroïsme de l’amour conjugal… Alceste, épouse du roi Admète, se sacrifie pour sauver son mari qui, pour ne pas mourir, doit trouver un remplaçant pour descendre dans les Enfers à sa place…

Peyron illumine sa courageuse et vertueuse héroïne dans une composition qui évoque la lumière émergeant des ténèbres… L’histoire mythique raconte qu’Hercule se rendra plus tard dans l’Hadès (Les Enfers) pour ramener Alceste à la vie…
AMATEURS D’ART ET COLLECTIONS
Si toutes les époques ont connu de grandes collections, le phénomène évolue au XVIIIe siècle quand des collectionneurs, souvent érudits, contribuent à la diffusion de la culture, des arts et des styles…

Des collections d’amateurs…
Au XVIIIe siècle, le roi et l’aristocratie ne sont plus les seuls à se constituer des collections d’art. Il existe alors des catalogues de vente rédigés et annotés par des experts avec des descriptions détaillées des œuvres…
Ainsi, un groupe sculpté de Louis-Claude Vassé, L’Amour assis sur le bord de la mer, appartient à trois célèbres collections d’amateurs : celles de Lalive de Jully, à l’origine de la commande en marbre, celle de la comtesse du Barry et celle de l’impératrice Joséphine.
Artiste néoclassique, Louis-Claude Vassé, élève de Bouchardon, réalise un groupe en marbre sur le thème antique du dieu de l’Amour assis sur le bord de la mer. Éros rassemble les colombes du char de Vénus…



D’après Six figures, d’Antoine Watteau, sanguine ; Étude de mains, de Hyacinthe Rigaud, pierre noire, rehauts de blanc, papier gris-bleu, pour le Portrait de Louis XV, signé et daté de 1730 ; et un Enfant nu tenant une faucille, sanguine d’Edme Bouchardon ; acquis pour le cabinet du roi en 1775-1776, collection Mariette, XVIIIe siècle. (Marsailly/Blogostelle)
La collection Pierre Jean Mariette
L’un des plus célèbres collectionneurs, Pierre Jean Mariette (1694-1774), éditeur et graveur érudit, réuni une précieuse collection, dont une majorité de dessins. Il réunit notamment quelque dix mille dessins de grands artistes, mais aussi des chefs-d’œuvres de maîtres plus modestes.
Mariette baigne dans le milieu des amateurs du XVIIIe siècle, qui sont souvent des passionnés cultivés. Parfois, ces collectionneurs pratiquent eux-même les arts – dessin, gravure, peinture…
Parmi les artistes français, Mariette regroupe des œuvres graphiques de Jacques Callot (1592-1635), Nicolas Poussin (1594-1665 apjc), Simon Vouet (1590-1649), Jean-Antoine Watteau ( 1684-1721), Hyacinthe Rigaud (1659-1743)…

Mariette réalise des montages et appose sa marque
Si, à sa disparition, la collection de Mariette se trouve dispersée aux enchères (entre le 15 novembre 1775 et le 30 janvier 1776), près de mille dessins seront néanmoins acquis pour le Cabinet du roi (époque Louis XVI) entre 1775 et 1776…
Mariette se distingue par la manière dont il travaille sur sa collection, en insérant les œuvres dans des montages réalisés par ses soins. Ainsi, cet amateur d’art n’hésite pas à découper, à recadrer, à compléter, à séparer les rectos des versos et à mettre en page les dessins, sans oublier d’y apposer sa marque…

Au XVIIIe siècle, en France, des artistes continuent de représenter l’expression du sacré… La peinture historique, y compris religieuse, demeure au sommet de la hiérarchie des genres de l’Académie Royale. Même si le portrait, le paysage et la nature morte prennent de plus en plus d’importance, l’art Sacré permet aux artistes d’accéder à une carrière officielle…
Article suivant : L’art religieux au siècle des Lumières (I)
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