Les premières villes de l’Histoire…
Partons à la découverte des civilisations du Proche et Moyen Orient Antiques… L’histoire des arts dans ce monde très ancien regroupe plusieurs cultures qui s’épanouissent sur une aire géographique immense… Dès les IXe et VIIIe millénaire avjc, les peuples du Levant sont des précurseurs dans l’adoption d’un mode de vie néolithique… Ils sont aussi les bâtisseurs des premières cités de l’histoire de l’Humanité… La céramique fait son apparition au VIe millénaire avjc. À la fin du IVe millénaire avjc, l’écriture naît à Sumer, en Mésopotamie…
Par Maryse Marsailly (@blogostelle)
– Dernière mise à jour mai 2017 –

Vers 6000 ans avjc, les peuples du Levant et de l’Orient ancien inventent puis perfectionnent la technique de la terre cuite : la céramique… Des décors peints ou sculptés viendront embellir les poteries…
Bloc-notes + Une aventure ? L’épopée de Gilgamesh (Mésopotamie) : des tablettes du XIIIe siècle avjc racontent l’épopée du roi Gilgamesh en quête d’immortalité… (il aurait régné vers 2600 avjc sur la cité d’Uruk (ou Ourouk )… Un livre ? L’Histoire commence à Sumer, de Samuel Noah Kramer (1956).
REPÈRES CHRONOLOGIQUES
Période néolithique : VIIIe millénaire avjc – IVe millénaire avjc – Le Levant précurseur du néolithique aux VIIIe et VIe millénaires avjc : agriculture et élevage – VIIe millénaire avjc : Jérico, en Jordanie (Palestine) – VIe millénaire avjc : Çatal Höyük et Haçilar en Anatolie, (Turquie) – VIe, Ve et IVe millénaire avjc : Samarra, Halaf, Obeid, Eridu, en Mésopotamie, Tépé Gaura en Assyrie – IVe millénaire avjc : Suse, Tepé Sialk, et Luristan en Iran. –– L’écriture à SUMER vers 3300 avjc. Chronologie générale : Proche et Moyen Orient antiques
LES RÉGIONS DU LEVANT ACCUEILLENT UNE MOSAÏQUE DE PEUPLES
La Mésopotamie au sens large du terme regroupe à elle seule la quasi majorité des territoires du Croissant Fertile. C’est là que vivent des nomades qui finalement se fixent dans les plaines propices aux cultures agricoles…

Des peuples nomades se sédentarisent…
La Mésopotamie-Assyrie, l’Iran ancien et les contrées du Levant représentent de nos jours un nombre important de pays. Chypre, la Turquie, Israël, la Palestine, la Jordanie, la Syrie, l’Irak, l’Iran, les Émirats, l’Arabie Saoudite…, tous sont les héritiers des ancestrales cultures de l’Orient Ancien.
Le monde fertile de la Mésopotamie
Des peuples nomades vivent à la lisière du désert syrien et arabique, au cœur d’une vaste étendue… Ils se sédentarisent… Au cours du temps, la Basse Mésopotamie, les régions du Pays de Sumer autour de l’Euphrate et du Tigre, la Babylonie et l’Assyrie construisent une culture qui se rattache à l’ensemble mésopotamien, dont Sumer et Babylone sont les centres rayonnants les plus importants…

Les Terres cosmopolites du Levant
Le Levant rassemble une partie de la côte syrienne, Chypre, la Palestine, la Jordanie et l’Anatolie antique… Cette aire géographique correspond à la pointe Ouest du Croissant Fertile.
Les régions de Levant forment un carrefour à la fois géographique et marchand. Cette zone de transition se distingue par une population cosmopolite. Terre de prédilection des Hittites, l’Anatolie ancienne, en Asie mineure, se rattache à la fois à l’Arménie, au Kurdistan et à l’Iran…
Le plateau iranien, un pont vers l’Extrême-Orient
L’Iran ancien correspond aux civilisations qui évoluent sur le plateau iranien, bordé à l’Est par le désert et qui ouvre la route vers l’Extrême-Orient… Les hautes terres iraniennes séparent la plaine mésopotamienne de la Vallée de l’Indus et de la plaine de Turkmenie en Asie centrale.

Des indo-européens, Hourrites et tribus des steppes, peuplent le plateau iranien (Arménie, Kurdistan). Au cours du temps, sur le plateau iranien, le pays d’Élam et Suse, rivaux de Sumer et Babylone, deviennent eux aussi des centres puissants. Ils représentent l’apogée de la civilisation iranienne antique, avant l’avènement de l’empire perse.
On construit des villages au Levant
Entre les Xe et VIe millénaire avjc, les peuples des régions du Levant s’affirment comme les précurseurs d’un mode de vie néolithique… Ils s’installent dans des villages, pratiquent l’agriculture et l’élevage. Au Levant, on construit les premiers espaces urbains en Palestine et en Syrie…

Les Natoufiens, premiers néolithiques
Dans les régions du Levant, entre 10 000 ans et 8300 ans avjc, les peuples de la civilisation des Natoufiens occupent un vaste territoire allant du moyen Euphrate au delta du Nil. Ils se sédentarisent, se lancent dans l’élevage et s’intéressent à la culture des céréales… On utilise encore des outils en os, mais on adopte progressivement un mode de vie néolithique…
LA CITÉ DE JÉRICHO
Au VIIIe-VIIe millénaire avjc en Palestine, les peuples qui vivent là s’installent dans des villages. Mais ils ignorent encore comment fabriquer des céramiques, c’est à dire des terres cuites. À Jéricho, certains vestiges remontent même à 9000 ans avjc…

Des crânes remodelés pour les défunts de Jéricho…
Les villageois de Jéricho utilisent encore des outils en pierre et les artistes créent des figurines en argile… À cette époque, on pratique des rites funéraires, en séparant la tête du défunt du reste de son corps…
On installe ensuite les crânes remodelés sur des banquettes, en Palestine comme en Syrie. Ce rituel funéraire renvoie peut-être à un culte des ancêtres, que l’on vénère sans doute dans les maisons… Les officiants funéraires séparent la tête du défunt de son corps avant de la fixer sur un corps modelé en terre…
Ils revêtent ensuite les crânes décharnés d’un enduit de plâtre qui permet de les remodeler avec des traits réalistes… Ils incrustent aussi des coquillages au niveau des yeux, ce qui donne une expression impressionnante à ces têtes remodelées… Parfois les cheveux sont peints…
D’après des vestiges, tour de fortification, Jéricho, VIIIe millénaire avjc ; et un crâne remodelé, Jéricho, Palestine ; Levant néolithique. (Marsailly/Blogostelle)
La Tour de Jéricho
Le site de Jéricho abrite les toutes premières tentatives d’architecture connues… et les vestiges de l’une des premières cités de l’histoire de l’Humanité… Parmi les ruines anciennes de Jéricho, on peut voir des traces d’habitations, les restes d’une muraille et les témoignages de l’existence d’un lieu de culte…
À l’écart du village, vers 8300 ans avjc, on élève à Jéricho une haute tour en circulaire, entièrement en pierre, dont l’accès n’est pas facile. Peut-être que les villageois viennent se réunir autour et dans cette tour pour des assemblées, des cérémonies sacrées ou encore pour organiser des rites d’initiation. La tour de Jéricho figure parmi les plus anciens vestiges d’édifice collectif construit au monde…

La muraille de Jéricho…
Les habitants de Jéricho construisent aussi une enceinte ou des fortifications autour de leur tour, sans doute pour se protéger des crues du Jourdain… L’étude des traces d’habitations, à demi enterrées, laissent imaginer un mode de vie communautaire
C’est l’archéologue Britannique Kathlenn Kenyon qui découvre La Tour de Jéricho en 1952. L’édifice mesure alors 8,5 mètres de hauteur pour un diamètre équivalent. À l’intérieur, la tour est reliée à un mur de 4 mètres d’épaisseur, vestige probable de la muraille de la cité…
Les Trompettes de Jéricho…
Le récit biblique raconte comment les Hébreux s’emparent de la ville de Jéricho…“L’Éternel dit à Josué : Vois, je livre entre tes mains Jéricho et son roi, ses vaillants soldats… vous tous les hommes de guerre, faites une fois le tour de la ville. Tu feras ainsi pendant six jours…
… Sept sacrificateurs porteront devant l’arche sept trompettes retentissantes… le septième jour, vous ferez sept fois le tour de la ville et les sacrificateurs sonneront des trompettes… Quand ils sonneront de la corne retentissante, quand vous entendrez le son de la trompette, tout le peuple poussera de grands cris… Alors la muraille de la ville s’écroulera…”
D’après Le Penseur, carafe, terre cuite, vers 3800 ans avjc, Yehud, Israël, Levant néolithique ; Le Penseur, Auguste Rodin (Dante Alighieri), 1880-1902 apjc, XIXe siècle ; et une poterie peinte, IVe millénaire avjc, Israël, Levant néolithique. (Marsailly/Blogostelle)
Les maisons rondes de Mureybet en Syrie…
À la même époque en Syrie, vers 8000 ans avjc- VIIe millénaire avjc, on construit aussi à Mureybet… On crée des habitations circulaires de 6 mètres de diamètre. L’espace intérieur, divisé et aménagé, rappelle la structure des huttes. Les fondations des maisons sont en pierres et les murs en pisé poncé.
On obtient le pisé grâce à un mélange d’argile crue et de pierres. Sur les maisons, on installe un toit plat en terre battue, soutenu par des rondins de bois qui font office de charpente rudimentaire. On utilise la terre battue pour étanchéifier la maison. Entre 7600 et 6000 avjc, en Palestine comme en Syrie, on ne connaît pas encore la terre cuite. Les habitats sont là encore assez sommaires, de forme circulaire puis rectangulaire…
EN ANATOLIE, LES POTIERS CRÉENT LES PREMIÈRES CÉRAMIQUES
Entre 6000 et 3500 avjc, en Anatolie (actuelle Turquie), les peuples vivent à l’heure néolithique et façonnent les premières poteries en terre cuite. À Çatal Höyük et à Haçilar, on vit dans des villages et on met au point la technique de la terre cuite, c’est-à-dire la céramique.

L’art de la céramique de Çatal Höyük et Haçilar va se répandre dans toutes les contrées de l’ancien Orient…
Le village de Çatal Höyük,
À Çatal Höyük, on construit des maisons rectangulaires, sans porte ni fenêtre, bien serrées les unes contre les autres. L’ensemble forme un véritable village. Pour les murs, on utilise de la brique crue et du bois pour consolider le tout. Le toit des habitations en terre battue forme une terrasse sur laquelle on peut accéder grâce à une échelle. À l’intérieur, l’espace du foyer est bien délimité.
Des habitats et des maisons-sanctuaires
Il existe deux sortes de constructions à Çatal Höyük… On bâtit des petites maisons avec poutres, foyer et terrasse, et l’on édifie d’autres constructions qui s’apparentent à des maisons-sanctuaires. On magnifie ce deuxième type de bâtiment avec des décors de gypse en relief, des peintures et des bucranes. Les bucranes sont des crânes cornus de taureau.
D’après un décor peint, habitation, Taureau et scène de Chasse ; une maison néolithique et une céramique ; Çatal Hüyük, vers 7000-6000 avjc, Anatolie, Levant néolithique. (Marsailly/Blogostelle)
LA DIMENSION SACRÉE DU TAUREAU
L’importance du Taureau à Çatal Höyük
Les peintures, les sculptures en argile modelée et les bucranes de Çatal Höyük renvoient probablement à une signification symbolique ou sacrée, en relation avec la fertilité. On retrouve le thème de la fécondité dans les représentations féminines néolithiques…
À Çatal Höyük, on évoque l’importance sacré du Taureau dans les peintures et avec les crânes cornus de l’animal. Le Taureau symbolise la puissance du principe mâle fécondateur. Les figures féminines modelées en terre sont sans doute des déesses-mères… Ce décor sacré semble particulariser des espaces dédiés dans des maisons-sanctuaires…
D’après des crânes de Taureau, bucranes néolithiques, et l’espace intérieur d’une maison-sanctuaire, VIe millénaire avjc, Çatal Höyük, Anatolie (Turquie), Levant Néolithique. (Marsailly/Blogostelle)
Des peintures en rouge et noir
Les couleurs de prédilection des artistes peintres de Çatal Höyük sont le rouge et le noir… Parmi l’iconographie figure le Taureau, des chasseurs, des léopards, qui rappellent les fauves de la déesse, ou encore un vautour aux ailes déployées qui dévore des dépouilles sans têtes… une possible évocation de rites funéraires. Ces images possèdent sans doute une signification sacrée…
D’après un relief peint, Léopards, VIIe-VIe millénaire avjc, un Chasseur vêtu d’une peau de léopard, VIe millénaire avjc ; et le thème du Vautour, vers 7000-6000 avjc ; Çatal Höyük, Anatolie, Levant Néolithique. (Marsailly/Blogostelle)
Au VIe millénaire avjc en Anatolie, les artistes peignent aussi des scènes de chasse, des léopards, des grands taureaux et des motifs géométriques.
Des nus féminins aux formes généreuses
À Çatal Höyük, les artistes façonnent aussi dans l’argile des représentations féminines acéphales (sans tête) ou non, des déesses accouchant, ou encore avec un enfant. Ce sont probablement des déesses-mères… Ces femmes nues aux formes opulentes, parfois parées d’un collier, semblent personnifier un culte de la fécondité…
Ces images de femmes au dessin schématique évoquent davantage un concept ou un principe plutôt qu’une figure de femme bien définie, comme on le voit aussi dans les cultures de l’Europe néolithique, où les silhouettes sont moins dodues mais où les hanches et les seins sont fortement valorisés…
D’après des figurines féminines, terres cuites, Çatal Höyük, vers 7000-6000 avjc, Anatolie ; et une déesse-mère aux Léopards, VIe millénaire avjc, Çatal Höyük, Anatolie, Turquie actuelle ; Levant Néolithique. (Marsailly/Blogostelle)
Fécondité, fertilité, procréation, maternité… apparaissent comme des valeurs sacrées dans l’Orient comme dans l’Occident néolithique… Et cette sacralisation de la femme s’exprime déjà dans l’art préhistorique… Voir aussi les articles Les cultivateurs néolithiques sacralisent la végétation une mythologie reliée à la Terre… Et L’art paléolithique consacre la féminité et le monde animal
La Déesse-Mère aux Léopards
Parmi les œuvres façonnées dans l’argile, on rencontre une Déesse-Mère accompagnée de Léopards. Les fauves rappellent l’aspect sauvage de la Nature… Installée sur un trône dont les accoudoirs prennent la forme de léopard, la déesse possède un parèdre masculin. Le ou la parèdre est une divinité masculine ou féminine associée à une déité principale pour former un couple ou une complémentarité.

La Déesse-Mère, la fécondité et la chasse…
Le Taureau, symbole du principe mâle s’associe à Çatal Höyük à l’image de la Déesse-Mère… Les images féminines affichent un visage très rudimentaire, presque anonyme. Associées à l’Enfant ou au Léopard, elles personnifient la Fécondité, associée peut-être aussi à l’abondance de la chasse symbolisée par le fauve ou le léopard, le chasseur par excellence…
LES POTIERS ANATOLIENS D’HAÇILAR
Les potiers d’Haçilar en Anatolie
Au début du VIe millénaire avjc en Anatolie, le centre de fabrication de la céramique de Çatal Höyük est détruit. Ce sont alors les potiers d’Haçilar qui vont produire des terres cuites entre 5500 ans et 5000 ans avjc. Les artistes créent maintenant des modèles élaborés, aux décors soignés, peints en rouge sur un fond blanc-crème…
D’après des céramiques peintes, vers 5000 ans avjc, Haçilar, Anatolie, Turquie ; et un décor de terre cuite, couple enlacé, vers 5300 avjc, Haçilar, Anatolie ; Turquie actuelle, Levant Néolithique. (Marsailly/Blogostelle)
Terres cuites peintes et quelques incrustations
Parmi les créations des artistes de Haçilar, on peut voir un visage humain stylisé qui habille le col d’une poterie. Pour mettre en valeur les yeux de cette figure, le potier incruste de l’obsidienne, une pierre noire volcanique très brillante dont l’aspect rappelle le verre… L’image d’un couple enlacé évoque l’accouplement et la fertilité et rejoint le thème du culte de la fécondité, symbolisé aussi par les déesses-mères…

On retrouvera, par la suite, le thème du Taureau dans l’art sumérien, une image sacrée dès le Néolithique dans les régions du Levant…
Mésopotamie : céramique, architecture, écriture… Sur le plateau iranien, on fonde la cité de Suse et sa nécropole à la fin du cinquième millénaire avjc. Au IVe millénaire avjc, les artistes de Samarra et de Halaf, en Mésopotamie, créent des modèles originaux de céramiques. On construit des temple à Obeid et à Eridu… Puis, à la fin du IVe millénaire avjc, l’écriture naît à Sumer…
Article suivant : Des peuples néolithiques du Levant… au génie de Sumer (deuxième partie)
Sommaire : l’Art au Proche et Moyen Orient Antiques
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Bloc-notes + Exposition L’histoire commence en Mésopotamie, Louvre-Lens, 2 novembre 2016 – 23 janvier 2017 : louvrelens.fr/documents/10181/121770/Dossier_pedagogique_Mesopotamie_BD.pdf/a8ac2280-e606-4039-9037-0bf4113f7d09?type=pdf

An impressive history of the eastern Mediterranean
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