L’art au XVIIIe siècle, les artistes expriment la ferveur révolutionnaire

D'après l'art au 18e siecle, le Néoclassique, histoire de l'art. (Marsailly/Blogostelle)

Fin XVIIIe siècle : art et Révolution

L’art au XVIIIe siècle (dixième volet)… La France des Lumières couve en son sein les feux d’une révolution politique et sociale radicale, qui aboutit à la Révolution de 1789 et à la Déclaration des droits de l’homme. Des artistes anonymes ou connus expriment l’esprit révolutionnaire. Les œuvres louent la République et illustrent l’héroïsme civique… Olympe de Gouges, auteur de la Déclaration des droits de la femme, participe aux débats et s’élève contre l’esclavage… Morceaux choisis…

Par Maryse Marsailly (@blogostelle)
– Dernière mise à jour mai 2021 –

D'après La mort de Marat, de Joseph Roques (maître d’Ingres), 1793, huile sur toile, XVIIIe siècle, Néoclassique. (Marsailly/Blogostelle)
D’après La mort de Marat, de Joseph Roques (maître d’Ingres), 1793, huile sur toile, XVIIIe siècle, néoclassique. (Marsailly/Blogostelle)

REPÈRES CHRONOLOGIQUES
Le XVIIIe siècle en France : Louis XIV : 1638 – 1715. Régence de Philippe II, duc d’Orléans : 1715-1723 (minorité de Louis XV) – Louis XV : 1715 – 1774 – Louis XVI : 1774-1792 – Révolution Française 1789 – Première République. Convention : 1792-1795 (Robespierre, La Terreur 5 septembre 1793 – 28 juillet 1794) – Directoire : 1795 – 1799 – Consulat : 1799-1804 – Premier Empire : Napoléon Ier : 1804-1814.

LA RÉVOLUTION FRANÇAISE CHANGE LA DONNE…

Au XVIIIe siècle, en Europe, différents systèmes politiques favorisent une riche classe dirigeante (aristocratie et haute bourgeoisie) : la monarchie absolue, la monarchie parlementaire puis la République, plus ou moins contrôlée par les oligarques. La culture artistique perdure, ainsi que les références à l’antiquité qui nourrissent l’art néoclassique…

D’après une Allégorie de la République, La Vérité amène la République et l’Abondance, de Nicolas de Courteille, Salon de 1793, France, XVIIIe siècle, Néoclassique. (Marsailly/Blogostelle)
D’après une allégorie de la République, La Vérité amène la République et l’Abondance, de Nicolas de Courteille, Salon de 1793, France, XVIIIe siècle, Néoclassique. (Marsailly/Blogostelle)

Les artistes illustrent l’héroïsme civique…
Pour les artistes, travailler devient plus difficile pendant les périodes révolutionnaires. Pourtant, la vie artistique perdure… Parfois on caricature l’aristocratie et le clergé mais, surtout, on exalte la République et on illustre l’héroïsme civique…

Le Brutus exemplaire de Jacques-Louis David
Dans Les Licteurs rapportant à Brutus le corps de ses fils, Jacques-Louis David représente un Brutus à la vertu exemplaire, auprès de la statue de la cité de Rome, symbole du devoir civique, alors qu’on lui ramène les corps de ses fils… Dans l’Antiquité, les licteurs officient pour la magistrature romaine.

D’après Les Licteurs rapportant à Brutus le corps de ses fils, de Jacques-Louis David, Salon de 1789, France, XVIIIe siècle, Néoclassique. (Marsailly/Blogostelle)
D’après Les Licteurs rapportant à Brutus le corps de ses fils, de Jacques-Louis David, Salon de 1789, France, XVIIIe siècle, Néoclassique. (Marsailly/Blogostelle)

Sous la nouvelle République romaine, fondée en 508, le consul Brutus a deux fils, Titus et Tibérius, qui participent à une conspiration fomentée par les Vitellii, la famille de leur mère. Titus et Tibérius sont alors condamnés à mort…

Les canons néoclassiques
Comme pour Le Serment des Horaces (salon de 1785), le Brutus de David exalte l’héroïsme civique, la vertu morale, la droiture et le sens du devoir…

Un univers fidèle à l’esprit de Diderot et à celui des Lumières et de la Raison. Le style sobre et rigoureux de ce tableau repose sur les canons néoclassiques : sobriété, économie des moyens dans le dessin comme dans la palette des couleurs…

D’après Brutus, Les Licteurs rapportant à Brutus le corps de ses fils, de Jacques-Louis David, Salon de 1789, France, XVIIIe siècle, Néoclassique. (Marsailly/Blogostelle)
D’après Brutus, Les Licteurs rapportant à Brutus le corps de ses fils, de Jacques-Louis David, Salon de 1789, France, XVIIIe siècle, Néoclassique. (Marsailly/Blogostelle)

Brutus dans l’ombre, les femmes dans la lumière…
Cependant,  Jacques-Louis David innove… Le peintre compose son tableau avec, d’un côté, un Brutus impassible, installé dans l’ombre. Et, de l’autre côté, apparaissent en pleine lumière les femmes de la famille, visiblement éplorées…

Au centre de la toile se trouve un fauteuil, une table et une corbeille à couture, qui évoquent la vie domestique et tranquille de la maisonnée… un bonheur brisé que pleurent les femmes…

D’après le groupe des femmes, Les Licteurs rapportant à Brutus le corps de ses fils, de Jacques-Louis David, Salon de 1789, France, XVIIIe siècle, Néoclassique. (Marsailly/Blogostelle)
D’après le groupe des femmes, Les Licteurs rapportant à Brutus le corps de ses fils, de Jacques-Louis David, Salon de 1789, France, XVIIIe siècle, Néoclassique. (Marsailly/Blogostelle)

Brutus ne montre pas ses émotions…
Dans cette mise en scène théâtrale, Brutus semble absent face au drame qui se joue. Il ne montre pas ses émotions, semble indifférent, enfermé dans sa dignité… et il tourne le dos aux dépouilles de ses fils rapportées par les Licteurs…

Comme dans Le Serment des Horaces, la composition des Licteurs rapportant à Brutus le corps de ses fils reprend la thématique de l’opposition entre un groupe masculin austère, spartiate et rigide et un groupe féminin doux, sensible et affligé par le fatalisme de la situation…

D’après la corbeille, Les Licteurs rapportant à Brutus le corps de ses fils, de Jacques-Louis David, Salon de 1789, France, XVIIIe siècle, Néoclassique. (Marsailly/Blogostelle)
D’après la corbeille, Les Licteurs rapportant à Brutus le corps de ses fils, de Jacques-Louis David, Salon de 1789, France, XVIIIe siècle, Néoclassique. (Marsailly/Blogostelle)

David adhère au mouvement révolutionnaire
Pour David, à l’époque de la France révolutionnaire, cette toile des Licteurs rapportant à Brutus le corps de ses fils s’apparente peut-être à un manifeste politique, illustrant le sacrifice à la République …

En effet, l’artiste adhère au mouvement révolutionnaire et devient même un député de la Convention. Par ailleurs, sous la Terreur, David dessine un Triomphe du peuple Français (possible décor d’un rideau de scène)…

David illustre Le Triomphe du peuple Français
Le dessin de David Le Triomphe du peuple Français. Projet de décoration, comme le précise une inscription, est sans doute un projet de décor destiné à un rideau de scène d’Opéra. L’iconographie allégorique de cette œuvre montre la Monarchie vaincue par Peuple Français…

D’après Le Triomphe du peuple Français, de Jacques-Louis David, 1794, dessin, graphite, plume, encre et lavis, France, XVIIIe siècle, Néoclassique. (Marsailly/Blogostelle) 
D’après Le Triomphe du peuple Français, de Jacques-Louis David, 1794, dessin, graphite, plume, encre et lavis, France, XVIIIe siècle, Néoclassique. (Marsailly/Blogostelle)

Hercule incarne le peuple…
Le Peuple Français, incarné par Hercule gaulois armé de sa massue, triomphe sur un char. On renverse les partisans de l’ancien régime.

Des héros de la liberté, réels ou légendaires, antiques ou contemporains, tiennent des palmes symbolisant leur glorieux sacrifice (les réformateurs romains les frères Gracques, Brutus, Guillaume Tell, Marat, Louis-Michel Lepeletier de Saint-Fargeau…)

Avec Les Sabines, David prône la réconciliation…
Après l’exécution de Robespierre en 1794, David, emprisonné un temps, élabore alors Les Sabines, un tableau dont le sujet tiré de l’histoire romaine prône cette fois la réconciliation et la paix…

Son style évolue aussi, moins spartiate, davantage tourné vers le modèle grec… Voir aussi l’article David, Canova et la palette néoclassique…

D’après Les Sabines, faisant cesser le combat entre Romains et Sabins, de Jacques-Louis David, 1799, XVIIIe siècle, Néoclassique. (Marsailly/Blogostelle)
D’après Les Sabines, faisant cesser le combat entre Romains et Sabins, de Jacques-Louis David, 1799, XVIIIe siècle, Néoclassique. (Marsailly/Blogostelle)

Une « révolution bourgeoise de la prospérité et des Lumières »
Dans son ouvrage La civilisation et la Révolution française (1978), l’historien Albert Soboul, écrit…

Contre la noblesse dont elle affirmait le déclin et le peuple parce que insuffisamment éclairé, la bourgeoisie trouva dans la doctrine des philosophes une idéologie conforme à ses intérêts, à ses mœurs et à sa morale…

… Le XVIIIe siècle constitue un grand siècle d’expansion économique, de progrès de la richesse bourgeoise, d’éclat de la pensée rationaliste. À ce titre, il prépare la Révolution, révolution bourgeoise de la prospérité et des Lumières…

D’après La Gouvernante, 1739, huile sur toile de Jean-Siméon Chardin. Une caricature : un paysan porte un noble et un prélat sur son dos, auteur anonyme, estampe, après 1789 ; France, XVIIIe siècle. (Marsailly/Blogostelle)

Condorcet, un révolutionnaire engagé
Le philosophe, mathématicien et encyclopédiste Condorcet (Marie-Jean-Antoine-Nicolas de Caritat, marquis de Condorcet, 1743 -1794), reconnu par les institutions de l’Ancien Régime, protégé par Turgot, ministre de Louis XVI, devient un révolutionnaire engagé… Il écrit…

Les philosophes combattirent en faveur de la vérité… prenant pour cri de guerre : raison, tolérance, humanité

D’après un portrait du marquis de Condorcet, de Jean-Baptiste-François Bosio, dessin, lavis brun sur du graphite, fin XVIIIe siècle. (Marsailly/Blogostelle)
D’après un portrait du marquis de Condorcet, de Jean-Baptiste-François Bosio, dessin, lavis brun sur du graphite, fin XVIIIe siècle. (Marsailly/Blogostelle)

Condorcet soutenu par Voltaire et D’Alembert
Condorcet est nommé à l’Académie des Sciences en 1769, à l’âge de vingt-six ans, avant d’en devenir le secrétaire perpétuel en 1773… Voltaire puis D’Alembert soutiennent sa candidature à l’Académie française, où Condorcet est finalement élu, en janvier 1782, malgré des oppositions… 

Voir aussi l’article L’art au XVIIIe siècle : portraits de philosophes.

LA CHUTE DE LA MONARCHIE FRANÇAISE

De Versailles à Paris…
Quand les parisiennes marchent sur Versailles les 5 et 6 octobre 1789, Jules Michelet commente : Les hommes ont fait le 14 juillet, les femmes le 6 octobre. Les hommes ont pris la Bastille royale, les femmes ont pris la royauté elle-même, l’ont mise aux mains de Paris, c’est-à-dire de la Révolution.

D’après La Prise de la Bastille, le 14 juillet 1789, Jean-Baptiste Lallemand, vers 1789 apjc, France, XVIIIe siècle. (Marsailly/Blogostelle)
D’après La Prise de la Bastille, le 14 juillet 1789, Jean-Baptiste Lallemand, vers 1789, France, XVIIIe siècle. (Marsailly/Blogostelle)

Louis XVI aux Tuileries
En 1774, Louis XVI donne l’ordre de faire revenir le Parlement à Paris, devant le palais de Justice et la Sainte Chapelle…  Au début de la Révolution, le roi de France semble convaincu par le mouvement réformiste…

Cependant, il hésite à ratifier les textes élaborés peu après la prise de la Bastille, le 14 juillet 1789, qui proclament notamment l’abolition des privilèges et La Déclaration des droits de l’homme…

Ensuite le peuple envahit Versailles, le 5 octobre 1789, pour exiger que la famille royale demeure désormais à Paris. Louis XVI est emmené aux Tuileries, mais il tente de s’enfuir en juin 1791. Arrêté à Varennes, le roi, Marie-Antoinette et leurs enfants sont ramenés dans la capitale.

D’après Le Retour du Parlement, La justice ramène la félicité publique, de Jean Bernard, gravure, 1774 ; Le serment du jeu de paume, séance du 20 juin 1789 de l’Assemblée nationale, 1791-1792, et Le Triomphe du peuple Français, dessins de Jacques-Louis David, 1794, France, XVIIIe siècle. (Marsailly/Blogostelle)

La prise des Tuileries
Le 10 août 1792, la prise des Tuileries et l’incarcération de Louis XVI marquent la fin de la royauté en France…

L’Assemblée législative proclame alors la « suspension » du roi et décrète l’élection au suffrage universel d’une Convention, laquelle est chargée de rédiger une nouvelle Constitution, soit la première Constitution républicaine française datée du 24 juin 1793…

D’après la Journée du 10 août 1792, Patrie-Egalité-Liberté, de François Gérard, 1794, dessin, plume, encre, lavis et gouache ; la Prise du palais des Tuileries le 10 août 1792, de Jean Duplessis-Bertaux, 1793, huile sur toile ; et La Prise des Tuileries, le 10 août 1792, lithographie, Henri-Paul Motte, Salon de 1892  ; France, XVIIIe siècle. (Marsailly/Blogostelle)

François Pascal Simon Gérard dit François Gérard, l’un des élèves de David, réalise un dessin de La Journée du 10 août 1792 : le Peuple français demande la destitution du tyran…

La République française proclamée le 22 septembre 1792
La monarchie s’effondre donc… et la République française voit le jour… Le 21 septembre, la Convention nationale décrète à l’unanimité que la royauté est abolie en France.

D’après La République, drapée à l’antique avec bonnet phrygien, Antoine-Jean Gros, 1794, huile sur toile, France, XVIIIe siècle. (Marsailly/Blogostelle)
D’après La République, drapée à l’antique avec bonnet phrygien, Antoine-Jean Gros, 1794, huile sur toile, France, XVIIIe siècle. (Marsailly/Blogostelle)

Sur proposition de Danton, la République française est proclamée par la Convention, le 22 septembre 1792. Et Le décret de la Convention précise que, à compter de ce jour, 22 septembre 1792, les actes publics seront datés de l’an premier de la République française

Louis XVI, ultime monarque à avoir vécu au château de Versailles, est surnommé Louis le Dernier par les révolutionnaires… Il est finalement guillotiné le 21 janvier 1793…

Girondins et Montagnards siègent à l’Assemblée…
Siégeant à l’Assemblée et à la Convention, Girondins et Montagnards composent des équipes parlementaires de partisans.

D’après Maximilien Robespierre, portrait anonyme, huile sur toile ; et un portrait de Danton (Georges Jacques), huile sur toile de Constance-Marie Charpentier (sa belle-sœur) 1792 ; France, XVIIIe siècle. (Marsailly/Blogostelle)

Les Girondins (dits Brissotins à l’origine, du nom de leur leader Brissot), parmi lesquels figure Condorcet, regroupent plusieurs membres originaires de la région de la Gironde.

Ce groupe propose, par l’intermédiaire de Salles, de faire appel au peuple pour le jugement de Louis XVI. Des Girondins défendent aussi le bannissement ou la prison pour le roi de France plutôt que la peine capitale… Mais les Montagnards s’y opposent…

D’après un portrait de Louis de Saint-Just, de Pierre-Paul Prud'hon, huile sur toile, 1793, France, XVIIIe siècle. (Marsailly/Blogostelle)
D’après un portrait de Louis de Saint-Just, de Pierre-Paul Prud’hon, huile sur toile, 1793, France, XVIIIe siècle. (Marsailly/Blogostelle)

Les Montagnards sont des parlementaires qui siègent à la Convention, dans les “travées hautes” de l’Assemblée Législative, d’où leur nom. Ils sont alors menés par Robespierre, Danton, Saint-Just, Marat… et, plus radicaux que les Girondins, les Montagnards réclament l’exécution de Louis XVI…

Condorcet hostile à l’exécution de Louis XVI
Député de Paris à l’Assemblée législative, qu’il préside en 1792, Condorcet est élu à la Convention. Mais  il se range au côté des Girondins. Il est hostile à la peine de mort contre Louis XVI et combat la Constitution des Montagnards du 24 juin 1793.

Condorcet se retrouve mis en accusation… Il se cache chez une amie quelques mois avant de s’en aller pour protéger son hôte des Jacobins. Arrêté le 27 mars 1794, il s’empoisonne dans sa prison le lendemain…

D’après Le Triomphe de la Constitution de 1793, , France, XVIIIe siècle. (Marsailly/Blogostelle)
D’après Le Triomphe de la Constitution de 1793, de Joseph-Marie Vien, plume, encre noire, lavis, rehauts gouache blanche, France, XVIIIe siècle. (Marsailly/Blogostelle)

Le Triomphe de la Constitution de 1793
Joseph-Marie Vien compose Le Triomphe de la Constitution de 1793, une allégorie jacobine qui dépeint le triomphe de la République sur l’empire d’Autriche, évoqué par l’aigle à deux têtes.

Sous les traits d’une figure féminine, la République, drapée à l’antique, amène la Paix, avec son rameau d’olivier, et l’Abondance, avec sa corne… Derrière la République se tiennent  l’Égalité, la Fraternité et le génie ailé symbole de la Raison.  Mars et Hercule, des légionnaires et des lions incarnent le patriotisme.

Hercule tire un char qui rappelle celui du Triomphe de David. La Renommée et le coq gaulois survolent le cortège à l’antique… Au au premier plan, La Nature et ses enfants récoltent les fruits de l’Abondance…

D’après Louis XVI et l’abbé Edgeworth de Firmont au pied de l’échafaud, le 21 janvier 1793, de Charles Bénazech, France, XVIIIe siècle. (Marsailly/Blogostelle)
D’après Louis XVI et l’abbé Edgeworth de Firmont au pied de l’échafaud, le 21 janvier 1793, de Charles Bénazech, France, XVIIIe siècle. (Marsailly/Blogostelle)

1793, Louis XVI sur l’échafaud…
Le peintre Charles Bénazech illustre la fin de Louis XVI sur deux tableaux…  Sur l’un, il représente la reine, la sœur du roi “Madame Elisabeth”, le Dauphin et “Madame” la fille du roi. Tous font leurs adieux à Louis XVI…

Sur l’autre toile, le roi de France se prépare à être exécuté… Louis XVI est accompagné de l’abbé Edgeworth de Firmont, directeur spirituel de Madame Elisabeth de France et dernier confident du roi.

L’abbé prononce alors sa célèbre phrase : Fils de saint Louis, montez au ciel. Sur l’échafaud, monarque déchu, Louis XVI s’adresse au peuple : Je meurs innocent des crimes dont on m’accuse. Le roi est guillotiné par le bourreau Samson…

D’après Les adieux de Louis XVI à sa famille, 20 janvier 1793, de Charles Bénazech, France, XVIIIe siècle. (Marsailly/Blogostelle)
D’après Les adieux de Louis XVI à sa famille, 20 janvier 1793, de Charles Bénazech, France, XVIIIe siècle. (Marsailly/Blogostelle)

Robespierre, les sans-culottes et La Terreur
Robespierre prône l’élimination physique du roi et de tout ce qu’il incarne pour instaurer la République. Les hésitants se rallient à lui… et le vote qui s’ensuit valide la condamnation à la mort pour Louis XVI…

Soutenu par les sans-culottes parisiens, Maximilien Robespierre est aussi l’un des instigateurs de la chute des Girondins, en juin 1793.

Mais le régime de la Terreur instauré par Robespierre, entre le 5 septembre 1793 et le 28 juillet 1794, finit par conduire le chef de file des Montagnards à sa chute…

D’après l’Exécution de Robespierre et de ses complices, auteur anonyme, estampe, 1794, France, XVIIIe siècle. (Marsailly/Blogostelle)
D’après L’Exécution de Robespierre et de ses complices, auteur anonyme, estampe, 1794, France, XVIIIe siècle. (Marsailly/Blogostelle)

Robespierre sur l’échafaud en 1794…
Sur une estampe, titrée Exécution de Robespierre et de ses complices conspirateurs contre la liberté et l’égalité, le texte précise que l’exécution a lieu le 10 thermidor l’an II…

Robespierre est transporté en charrette sur la place de la Révolution (actuelle place de la Concorde, à Paris) où il est guillotiné le 28 juillet 1794, ainsi que vingt-et-un de ses partisans, dont son frère et Saint-Just…

Marat l’ami du peuple
Parmi les personnalités de la Révolution française, figure Jean-Paul Marat, surnommé l’ami du peuple. Outre ses activités de journaliste, Marat combat la royauté avant de s’opposer aux girondins.

Il élabore un projet de monarchie constitutionnelle dès 1789. Marat résume en une phrase sa pensée politique : Rien de superflu ne saurait appartenir légitimement, tandis que d’autres manquent du nécessaire.

D'après La Mort de Marat, de Jacques-Louis David, 1793, huile sur toile, France, XVIIIe siècle, Néoclassique. (Marsailly/Blogostelle)
D’après La Mort de Marat, de Jacques-Louis David, 1793, huile sur toile, France, XVIIIe siècle, Néoclassique. (Marsailly/Blogostelle)

Accusé par les girondins le 14 avril 1793, Marat est acquitté par le tribunal révolutionnaire le 24 avril et reprend son siège à l’Assemblée nationale. Mais le le 13 juillet 1793, il est assassiné dans son bain par Charlotte Corday, une femme proche des milieux girondins…

Le lendemain de la mort de Marat, le sans-culotte Guirault, porte-parole de la section du Contrat-Social, s’adresse alors au peintre Jacques-Louis David…

Ô crime ! une main parricide nous a ravi le plus intrépide défenseur du peuple. Il s’est constamment sacrifié pour la liberté…. Où es-tu David ? Tu as transmis à la postérité l’image de Lepeletier, mourant pour la Patrie, il te reste un tableau à faire !

D’après Les Derniers moments de Louis-Michel Lepeletier, de Jacques-Louis David, vers 1793, France, XVIIIe siècle, Néoclassique. (Marsailly/Blogostelle)
D’après Les Derniers moments de Louis-Michel Lepeletier, de Jacques-Louis David, vers 1793, France, XVIIIe siècle, Néoclassique. (Marsailly/Blogostelle)

Le député Louis-Michel Lepeletier de Saint-Fargeau fut également assassiné. Il fut immortalisé par David sur un tableau portant des citations…

Je suis vengé, le tyran n’est plus (en bas), Je vote pour la mort du tyran (texte de l’épée) et Le Peletier Saint Fargeau, tué au Palais Royal par Pâris, ancien garde du corps, le 20 janvier 1793, veille de l’exécution de Louis XVI (au revers).

OLYMPE DE GOUGES, FÉMINISTE AVANT-GARDISTE

Auteur de la Déclaration des droits de la femme (1791), Olympe de Gouges participe aux débats des Lumières et prend parti contre l’esclavage et, dès avant la Révolution, assume ouvertement ses convictions abolitionnistes et féministes…

D’après Olympe de Gouges, aquarelle et inscription : Elle s'était offerte pour défendre Louis XVI, auteur anonyme, France, fin XVIIIe siècle. (Marsailly/Blogostelle)
D’après Olympe de Gouges, aquarelle et inscription : Elle s’était offerte pour défendre Louis XVI, auteur anonyme, France, fin XVIIIe siècle. (Marsailly/Blogostelle)

« La femme naît libre…« 
En septembre 1791, Olympe de Gouges, écrivaine et dramaturge, fait paraître la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne, qui rappelle que la femme naît libre et demeure égale à l’homme en droits. 

Mais sa farouche opposition à Robespierre et aux Montagnards, dont elle critique la radicalité et la violence, provoque son arrestation. Sous la Terreur, elle meurt sur l’échafaud en novembre 1793…

Enfant non reconnu, Olympe de Gouges est élevée dans un milieu modeste. Elle se marie à dix-sept ans avant de se retrouver veuve et mère d’un fils.

D’après La Bulle de savon, de Jean-Siméon Chardin, 1734, huile sur toile, France, XVIIIe siècle. (Marsailly/Blogostelle)
D’après La Bulle de savon, de Jean-Siméon Chardin, 1734, huile sur toile, France, XVIIIe siècle. (Marsailly/Blogostelle)

Au début des années 1770, Olympe de Gouges s’installe à Paris où elle fréquente les milieux littéraires et du théâtre. Olympe défend la parole libre, cultive le débat et tient salon…

« Femme, réveille-toi…« 
Femme, réveille-toi ; le tocsin de la raison se fait entendre dans tout l’univers ; reconnais tes droits. Le puissant empire de la nature n’est plus environné de préjugés, de fanatisme, de superstition et de mensonges. Le flambeau de la vérité a dissipé tous les nuages de la sottise et de l’usurpation…

… L’homme esclave a multiplié ses forces, a eu besoin de recourir aux tiennes pour briser ses fers. Devenu libre, il est devenu injuste envers sa compagne. Ô femmes! femmes, quand cesserez-vous d’être aveugles?” (Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne et autres écrits)

D’après La Fille de cuisine, 1738, La Blanchisseuse, 1730, et Une servante, 1738, huiles sur toile de Jean-Baptiste Simeon Chardin ; France, XVIIIe siècle. (Marsailly/Blogostelle)

Des convictions abolitionnistes et féministes
Avant la Révolution déjà, Olympe de Gouges ne cache pas ses convictions abolitionnistes et féministes. Les événements révolutionnaires lui permettent ensuite de participer davantage encore au débat d’idées de son temps…

Voir aussi l’article L’art au XVIIIe siècle, à l’époque des lumières, les frontières de l’esprit s’élargissent…

Cette redoutable pamphlétaire publie à son compte de nombreuses brochures et placards… L’écrivaine publie aussi deux romans, Mémoire de Madame de Valmont (1788) et Le Prince philosophe (1792), ainsi que des observations sur des sujets d’actualité, dont Réflexions sur les hommes nègres (1788).

D’après un portrait d'Olympe de Gouges, du peintre polonais Alexander Kucharsky, pastel, fin XVIIIe siècle. (Marsailly/Blogostelle)
D’après un portrait d’Olympe de Gouges, du peintre polonais Alexander Kucharsky, pastel, fin XVIIIe siècle. (Marsailly/Blogostelle)

La dramaturge écrit encore plusieurs pièces, dont Zamore et Mirza ou L’Heureux naufrage (1783), qui prend parti contre l’esclavage et que le Théâtre-français refuse de jouer…

Olympe dénonce « la férocité des despotes« 
Zamore et Mirza ou L’Heureux naufrage met en scène le destin de deux esclaves noirs. Mais ce drame en prose d’Olympe de Gouges provoque un scandale…  Ce qui vaut à cette auteure engagée des menaces du côté des esclavagistes, ces maîtres barbares dont elle dénonce la cruauté.

Quand sa pièce peut enfin être jouée par les comédiens du Roi, Olympe la publie à nouveau en 1788, avec des explications adressées au public.  Dans la préface de sa pièce elle écrit…

D’après Le Nègre Paul, de Jean-Baptiste Pigalle, 1760-1761, serviteur d’Aignan Thomas Desfriches, terre cuite, XVIIIe siècle. (Marsailly/Blogostelle)
D’après Le Nègre Paul, de Jean-Baptiste Pigalle, 1760-1761, serviteur d’Aignan Thomas Desfriches, terre cuite, XVIIIe siècle. (Marsailly/Blogostelle)

Cependant on me blâme, on m’accuse sans connaître même « l’Esclavage des Noirs », reçu en 1783 à la Comédie Française, imprimé en 1786, et représenté en Décembre 1789 … 

… Le véritable homme ne considère que l’homme. Voilà mes principes, qui diffèrent bien de ces prétendus défenseurs de la Liberté, de ces boutefeux, de ces esprits incendiaires qui prêchent l’égalité, la liberté, avec toute l’autorité et la férocité des despotes…

Zamore et Mirza : « un joug aussi cruel que honteux »
Extrait de Zamore et Mirza, d’Olympe de Gouges. Mirza à Zamore : dis-moi, pourquoi les Européens et les habitants ont-ils tant d’avantages sur nous, pauvres esclaves ? Ils sont cependant faits comme nous, nous sommes des hommes comme eux : pourquoi donc une si grande différence de leur espèce à la nôtre ?

D’après Esclaves noirs à la Martinique, de Marius-Pierre Le Masurier, 1775, huile sur toile, XVIIIe siècle. (Marsailly/Blogostelle)
D’après Esclaves noirs à la Martinique, de Marius-Pierre Le Masurier, 1775, huile sur toile, XVIIIe siècle. (Marsailly/Blogostelle)

Zamore : Cette différence est bien peu de choses ; elle n’existe que dans la couleur ; mais les avantages qu’ils ont sur nous sont immenses. L’art les a mis au-dessus de la nature : l’instruction en a fait des dieux, et nous ne sommes que des hommes. Ils se servent de nous dans ces climats comme ils se servent des animaux dans les leurs…

Des peintures et des gravures du peintre anglais George Morland (1763 – 1804) dénoncent le commerce des esclaves noirs. En 1794 l’artiste illustre la première abolition de l’esclavage dans les colonies françaises par la Convention Nationale le 4 février 1794.

D’après Execrable Human Traffick, 1789, huile sur toile, et gravure, 1794, de George Morland ; et une scène d’esclavagisme, gravure aquarellée, modèle de George Morland, 1794, Angleterre, XVIIIe siècle. (Marsailly/Blogostelle)

« Ces maîtres barbares »…
Zamore poursuit : … Ils sont venus dans ces contrées, se sont emparés des terres, des fortunes, des naturels, des îles…  La plupart de ces maîtres barbares nous traitent avec une cruauté qui fait frémir la nature… Ils se gardent bien de nous instruire…

Si nos yeux venaient à s’ouvrir, nous aurions horreur de l’état où ils nous ont réduits, et nous pourrions secouer un joug aussi cruel que honteux ; mais est-il en notre pouvoir de changer notre sort ? (Extrait de Zamore et Mirza, d’Olympe de Gouges)

D’après La Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, suppression de l'esclavage le 4 février 1794, estampe, eau-forte, France, XVIIIe siècle. (Marsailly/Blogostelle)
D’après La Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, suppression de l’esclavage le 4 février 1794, estampe, eau-forte, France, XVIIIe siècle. (Marsailly/Blogostelle)

« Les Mortels sont égaux« 
Sur une estampe de 1794, La Déclaration des droits de l’homme et du citoyen s’associe à un titre : Les Mortels sont égaux, ce n’est pas la naissance c’est la seule vertu qui fait la différence.  L’image fait référence à la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 et illustre notamment le décret de la suppression de l’esclavage…

Le décret d’abolition de l’esclavage dans les colonies paraît le 4 février 1794. Mais l’esclavage sera rétabli par Bonaparte en 1802 avant d’être définitivement aboli en 1848.

D’après Jean-Baptiste Belley, député Montagnard et Jacobin, d’Anne-Louis Girodet, 1798, France, XVIIIe siècle. (Marsailly/Blogostelle)
D’après Jean-Baptiste Belley, député Montagnard et Jacobin, d’Anne-Louis Girodet, 1798, France, XVIIIe siècle. (Marsailly/Blogostelle)

En 1798, Anne-Louis Girodet peint le député noir Jean-Baptiste Belley en représentant officiel de la République, dont le mandat vient de s’achever (circonscription de Saint-Domingue). Les colons évincent tous les députés de couleur des assemblées du Directoire…

LE PATRIMOINE DE L’ANCIEN RÉGIME

Dès 1789, des œuvres d’art regroupées au Louvre
À l’époque de la Révolution française, on s’efforce de détruire les symboles de la monarchie et ceux de la puissance de l’Église… Pourtant, le palais du Louvre est épargné, délaissé par le roi Louis XIV au profit de Versailles…

Dès 1789, on décide de stocker des œuvres d’art au Louvre, mais sans se préoccuper ni de conservation ni de restauration ni d’exposition. Puis, face à la colère destructrice des révoltés, on décide finalement d’organiser une politique de conservation. Ce moment marque la naissance de la notion de patrimoine… et le palais du Louvre devient un musée.

D’après L'exécution de Marie-Antoinette, le 16 octobre 1793, auteur anonyme, France, XVIIIe siècle. (Marsailly/Blogostelle)
D’après L’exécution de Marie-Antoinette, le 16 octobre 1793, auteur anonyme, France, XVIIIe siècle. (Marsailly/Blogostelle)

Des symboles de l’Ancien Régime perdurent…
La France de la Révolution française conservera néanmoins certains symboles de l’Ancien Régime pour promouvoir ou affirmer son autorité…

Le faste, notamment, perpétue une idée de puissance et de permanence politique, évoquant aussi la richesse de l’État. Une certaine magnificence permet d’asseoir le pouvoir politique…

Francisco de Goya (Saragosse 1746-Bordeaux 1828) peint un portrait de l’ambassadeur de France en Espagne entre 1798 et 1800, Ferdinand Guillemardet. Ce tableau est donné plus tard au Louvre, en 1865, par le fils du modèle, Louis Guillemardet, un grand ami de Delacroix…

D’après l'ambassadeur de France en Espagne, Ferdinand Guillemardet, de Francisco Goya, 1798, France, XVIIIe siècle. (Marsailly/Blogostelle)
D’après l’ambassadeur de France en Espagne, Ferdinand Guillemardet, de Francisco Goya, 1798, France, XVIIIe siècle. (Marsailly/Blogostelle)

La « majesté » d’un ambassadeur républicain…
Ainsi, sur le portrait de l’ambassadeur de la France républicaine en Espagne, peint par Francisco de Goya, l’ostentation des insignes tricolores et une pose empreinte d’une certaine arrogance permettent d’affirmer la fonction de ce représentant d’un état souverain.

Dans une attitude qui rappelle celle des portraits officiels des rois de France sous l’Ancien Régime… De même, sous l’empire napoléonien, les images de Bonaparte et de ses généraux exploitent la symbolique majestueuse de l’Ancien Régime…

Le Bonaparte triomphant de David
Si l’art Néoclassique et les références antiques continue d’inspirer les artistes, des touches novatrices commencent à se manifester à la fin du XVIIIe siècle. Comme sur la toile de Jacques-Louis David sur laquelle Bonaparte apparaît en héros triomphant, à cheval sur sa fougueuse monture, les cheveux au vent…

David dépeint une atmosphère émotionnelle inédite, qui annonce l’exaltation romantique, même si l’héroïsme idéalisé du personnage s’inscrit encore dans le courant néoclassique…

D’après Bonaparte franchissant le col du Grand Saint-Bernard, dans les Alpes, de Jacques-Louis David, 1800. (Marsailly/Blogostelle)
D’après Bonaparte franchissant le col du Grand Saint-Bernard, dans les Alpes, de Jacques-Louis David, 1800. (Marsailly/Blogostelle)

À la fin du XVIIIe siècle, en Angleterre, les réflexions d’Edmund Burke sur le Sublime et le Beau deviennent une source d’inspiration pour les artistes. Novateurs, James Barry, Thomas Banks et surtout Nicolaï Abraham Abildgaard assument un art original, qui prend des libertés au-delà des codes néoclassiques, parfois jusqu’à l’extravagance ou l’exacerbation…

Article suivant : XVIIIe siècle : James Barry, Thomas Banks et Abildgaard s’affranchissent des canons classiques 

Le sommaire L’Art au XVIIIe siècle

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Publié par Maryse Marsailly

Blogostelle : Histoire de l'Art et du Sacré. Civilisations, chefs-d'œuvre, mythes, symboles..., tout un univers s'exprime dans les œuvres d'art.

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