Les cités-royaumes des souverains de Sumer…
Nous sommes toujours en Mésopotamie, au milieu du IIIe millénaire avjc… Au cours de la période dite des dynasties archaïques, qui perdure cinq cents ans, on élabore le principe de la cité-état, on élève des palais et des temples, on sculpte des reliefs commémoratifs, on grave des sceaux… Entre 2850 avjc et 2340 avjc, on fonde des royaumes qui rivalisent pour conquérir la suprématie… La culture sumérienne rayonne…
Par Maryse Marsailly (@blogostelle)
– Dernière mise à jour février 2017 –

Bloc-notes + Une aventure ? L’épopée de Gilgamesh (Mésopotamie) : des tablettes du XIIIe siècle avjc racontent l’épopée du roi Gilgamesh en quête d’immortalité… (il aurait régné vers 2600 avjc sur la cité d’Uruk (ou Ourouk )… Un livre ? L’Histoire commence à Sumer, de Samuel Noah Kramer (1956).
REPÈRES CHRONOLOGIQUES
La période des dynasties archaïques sumériennes, vers 2900 avjc – 2340 avjc – Première période vers 2900 – 2700 avjc – Deuxième période vers 2700 – 2600 avjc – Ur-Nanshe fonde la première dynastie de Lagash, vers 2500 avjc – Troisième période des dynasties archaïques vers 2600 -2340 avjc. Chronologie générale Proche et Moyen Orient antiques
LA CITÉ MÉSOPOTAMIENNE, UN CENTRE DYNASTIQUE ET SACRÉ
Chaque souverain sumérien exerce un pouvoir local sur la cité et ses terres environnantes. Le roi joue aussi un rôle sacerdotal. Le grand dieu Enlil, chef suprême du panthéon, confère la royauté. Mais chaque cité possède sa divinité tutélaire et protectrice…
La civilisation de Sumer essaime…
Au fil du temps, la civilisation urbaine née au pays de Sumer au IVe millénaire avjc (Irak actuel) se développe de plus en plus… Et différents peuples, dans les vastes et diverses régions de l’Orient Ancien, adoptent la culture sumérienne…

Un même esprit semble animer en Mésopotamie le désir de bâtir et de créer des institutions comparables. L’expression artistique aussi, sous différentes formes, semble s’inspirer d’un même terreau culturel sumérien, fondé sur des traditions, des rites, des croyances et des conventions…
De la Babylonie, à Tutub et à Eshnunna…
À l’époque des dynasties archaïques en Mésopotamie, la civilisation sumérienne se déploie jusqu’en Babylonie, dans des contrées situées en Irak actuel… et jusque dans la région d’Assour… Deux sites de la vallée de la Diyâlâ (rivière et affluent du Tigre), Tutub (actuel Khafadjé) et Eshnunna (actuel Tell Asmar), remontent à cette période, quand la Babylonie s’intègre alors dans la sphère de Sumer…
… jusqu’en Syrie à Mari et à Ebla
Au Sud, possible berceau du futur empire d’Agadé sous la dynastie d’Akkad, les influences sumériennes se marient à la tradition sémite… La civilisation sumérienne se déploie aussi en Syrie, en particulier à Mari, sur l’Euphrate (à la frontière Irak-Syrie), et à Ebla au Sud d’Alep en Syrie.
D’après deux statuettes d’un orant royal, un capridé dans les bras en offrande, albâtre, vers 2400 ans avjc, période des dynasties archaïques, pays d’Élam, actuel Iran, Orient ancien. (Marsailly/Blogostelle)
On dépose des statues et des statuettes votives dans les temples, avec parfois des inscriptions qui précisent la nature de la dédicace… Les mains jointes, le personnage royal, tête nue, porte le traditionnel kaunakès sumérien à franges laineuses…
À l’époque, le Pays de Sumer entretient des contacts réguliers avec les contrées du Golf arabo-persique… Les populations mésopotamiennes forment finalement une vaste communauté qui englobe aussi, au IIIe millénaire avjc, les habitants du futur pays de l’Élam, avec les montagnards du Fars et ceux de la plaine iranienne (actuel Iran)…

Des cités-états sous l’égide d’une divinité
La civilisation sumérienne se fonde sur le principe de la cité-royaume et sur un schéma urbain très organisé. Une multitude de villes rivales régissent leurs territoires environnants… Comme à Uruk (actuel Irak) au pays de Sumer, on place chaque cité mésopotamienne sous la tutelle d’une divinité dont le représentant, chef ou souverain, règne en maître… La lutte pour la suprématie provoque alors de nombreux conflits…
LA GLYPTIQUE ILLUSTRE LA MYTHOLOGIE ET LE CULTE DES DIEUX
Le grand dieu En-lil confère la souveraineté
Si chaque cité se place sous la domination et la protection d’une divinité particulière, tout le monde honore le dieu suprême du panthéon mésopotamien, Enlil… Mais le dieu sumérien de l’Atmosphère ne confère la royauté suprême qu’à une seule cité : celle qui obtient la suprématie sur ses rivales… Les batailles de cette époque vont inspirer la création des premiers récits épiques, gravés sur des tablettes d’argile…

Les artistes gravent des scènes cultuelles sur des sceaux
Les dieux mésopotamiens les plus importants sont Enlil, dieu de l’Atmosphère et souverain du panthéon, Enki (Ea akkadien), dieu de l’Abîme et des Eaux, le dieu-Soleil Shamash, et la grande déesse, Inanna-Ishtar, divinité de l’amour de la fertilité et de la guerre…
Les graveurs se lancent dans la glyptique et composent des scènes mythiques et cultuelles… Ainsi, on peut rencontrer la figure mythique de l’homme-oiseau, que l’on retrouvera plus tard sur les sceaux d’Agadé, accompagné une déité ailée sur le registre inférieur d’un sceau. En haut, un grand dieu cornu trône en majesté, entouré semble-t-il de porteurs d’offrandes qui sans doute viennent l’honorer peut-être dans un banquet…
D’après une empreinte de sceau, vers 2800 avjc, première période des dynasties archaïques, cité sumérienne d’Ur ; et une scène cultuelle et divinités, empreinte de sceau-cylindre, calcaire, vers 2600-2340 avjc, époque des dynasties archaïques, Sumer, Mésopotamie. (Marsailly/Blogostelle)
Les archives de la cité de Shuruppak-Fara
La cité de Shuruppak, actuelle Fara en Irak, abrite à l’origine des archives… Cette cité-royaume figure parmi les principautés qui se partagent la Mésopotamie du Sud au cours de l’époque des dynasties archaïques. On rencontre souvent sur les sceaux de ces époques anciennes des thèmes animaliers… Comme la figure du héros-dompteur ou du maître des Animaux…
Scène cultuelle et Hommes-Oiseaux
Sur un sceau dit du style de Fara, qui remonte à l’époque des dynasties archaïques, le graveur met en scène des animaux et des personnages mythiques, plus ou moins humains ou monstrueux. L’artiste organise sa composition en un jeu d’entrelacs et d’enchevêtrements. Les formes sont onduleuses et dessinées en relief… La composition décorative, dense et complexe, se déploie en chaîne fermée autour de la surface cylindrique.

Homme-taureau, fauves, gazelles, Hommes-Oiseaux, divinités ailées, créatures surnaturelles… Les scènes illustrent un monde mythique…
Des registres et des documents de transactions
Des vestiges d’habitations de Shuruppak, quelques tombes et surtout des sceaux-cylindres et des tablettes cunéiformes écrites en sumérien remontent au milieu IIIe millénaire… La touche artistique des empreintes des sceaux se distingue particulièrement, d’où le qualificatif de style de Fara…
L’iconographie s’inspire souvent des animaux, capridés affrontés et lions, de héros combattants et de créatures mythiques hybrides. Les archives de Shuruppak, officielles ou personnelles, contiennent en majorité des textes relatifs à la vie économique, comme des registres de comptabilité. On archive alors aussi quelques exemplaires de transactions concernant des terres.
D’après une tablette de comptes, vers 2500 avjc, dynasties archaïques, argile, Shuruppak-Fara, Irak ; et une image du dieu sumérien Enki (Ea akkadien), protecteur de l’Humanité, avec filets d’eau et poissons, IIIe millénaire avjc, empreinte de sceau ; Mésopotamie. (Marsailly/Blogostelle)
Une tablette de comptabilité gravée dans l’argile, qui se rapporte aux activités du gouverneur de la cité de Shuruppak… Les comptes sont inscrits en sumérien cunéiforme (en forme de clou ou de coin)…
Un roi de Fara devient le héros mythique du Déluge
Le Sumérien Ziusudra, l’un des souverains de Shuruppak-Fara, devient le héros du mythe sumérien du Déluge, dont il existe plusieurs versions… On retrouve ce sage personnage dans l’épopée de Gilgamesh (autre roi devenu légendaire) sous le nom de Outa-Napishtî (ou Ut-Napishtim) en akkadien, à l’époque ultérieure d’Agadée…
Prévenu et conseillé par le dieu Enki (Ea en akkadien) qui refuse d’accepter l’anéantissement de l’humanité par les divinités en colère, Ziusudra, sa famille et des animaux échappent au Déluge… Finalement, après une grande réconciliation avec les dieux, Ziusudra accède à l’immortalité… On retrouve ce personnage héros du Déluge dans le Noé biblique…
Gilgamesh, roi d’Uruk devenu légendaire
Des tablettes racontent aussi l’épopée du roi Gilgamesh, souverain devenu héroïque et légendaire, qui aurait régné vers 2600 avjc sur la cité d’Uruk (ou Ourouk). Gilgamesh et son ami Enkidu tuent le Taureau Céleste envoyé par Ishtar, furieuse que le roi d’Uruk refuse de l’épouser…

La célèbre épopée de Gilgamesh, héros en quête d’immortalité, se fonde sur l’existence historique d’un roi d’Uruk, une cité en guerre contre la ville de Kish…
Après la mort de son ami Enkidu, Gilgamesh rencontre Ut-Napishtim (Ziusudra), le survivant du Déluge devenu immortel. Le sage lui raconte son histoire et lui confie le secret de la plante de jouvence… Mais Gilgamesh manque de vigilance et se la fait voler par le serpent… Voir aussi l’article Introduction à l’Art du Levant, de la Mésopotamie et de l’Iran Ancien
Lugal, le roi ou Ensi, le prince ou En, le seigneur…
Les inscriptions mésopotamiennes mentionnent des titres variés pour qualifier la royauté… Ces titres, dont les termes sont interchangeables, désignent les différents souverains des différentes cités-royaumes… On rencontre les termes Lugal, le roi ; Ensi, le prince, ou encore En qui désigne un seigneur… Sur un sceau plus tardif, on rencontre encore le vocable Lugal…
D’après une scène d’adoration et d’offrande, sceau de Lugal-Ushumgal, shéma et relief, deuxième moitié du IIIe millénaire avjc, bulle de Tello, Irak actuel, Mésopotamie. (Marsailly/Blogostelle)
Le titre souverain de Lugal
Parmi les bulles de Tello (antique Girsu, Irak actuel), celle du scribe et prince de Lagash, Lugal-Ushumgal, montre une divinité qui émerge de la Montagne, sans doute Shamash, ici sans ses flammes. Le dieu Soleil est honoré semble-t-il par une autre déité et par un personnage qui présente un petit animal en offrande…
Le dieu visiteur lève la main vers sa bouche dans le geste codifié de la prière… La scène se déroule auprès d’un arbre au sommet duquel apparaît une fleur, symbole d’une végétation épanouie… Une inscription précise : O Sharkalisharri le fort, roi d’Agadé, Lugal-Ushumgal le prince de Lagash (… est) ton serviteur…
KISH, MARI, EBLA… LA VIE DE PALAIS ET LA MAJESTÉ DES TEMPLES
On bâtit les palais de Kish et de Mari (détruit plus tard par Hammurabi de Babylone) entre 2750 et 2600 avjc. Ces résidences royales comprennent un ensemble de salles qui s’ouvrent sur un espace central. Non loin des palais, on érige des sanctuaires… En Mésopotamie, la mission la plus importante du roi se rattache à la construction du temple.

Espace central et salle d’apparat pour le palais de Kish…
À l’époque des dynasties archaïques, les bâtisseurs distinguent l’architecture du palais royal et celle du temple dédié au dieu.
On construit le palais de Kish (Irak actuel) selon le plan mésopotamien traditionnel, fondé sur un ensemble de pièces qui s’ouvrent sur un espace central, couvert ou pas. Les architectes conçoivent aussi une salle plus monumentale, pièce d’apparat ou sorte de chapelle, qui rappelle l’architecture sacrée.
D’après une lance en cuivre, dédiée par le roi de Kish, Our Lougal, vers 2600 avjc, Tello, ancienne Girsu ; et une parure en or, à feuilles de chêne, vers 2600 -2500 avjc, tombes royales d’Ur ; dynasties archaïques, Sumer, Irak actuel, Mésopotamie. (Marsailly/Blogostelle)
La riche bibliothèque du palais d’Ebla
À Ebla (Tell Mardikh, Syrie actuelle), on construit dès le IIIe millénaire avjc… La salle rectangulaire des archives du palais royal, découverte dans les années 1974-1976, abrite environ 14 700 tablettes et fragments de tablettes, dont la majorité des textes sont rédigés en sumérien…
Dans ces archives d’Ebla, on entrepose à différentes époques d’occupation des documents relatifs à l’administration centralisée du palais, comme des comptes-rendus d’audiences. Les archives d’Ebla renferment aussi des hymnes sumériens, qui sont de véritables ouvrages littéraires…

Le premier dictionnaire de l’histoire?
On archive aussi à Ebla une collection de signes cunéiformes avec des indications de prononciation. S’y ajoute des listes de mots sumériens, leurs transcriptions phonétiques, leurs traductions dans la langue d’Ebla (éblaïte).
Parmi les huit listes de mots sumériens, la plus longue regroupe au moins 1500 vocables. C’est là peut-être le premier dictionnaire de l’histoire… On rencontre aussi un alphabet cunéiforme accompli au deuxième millénaire avjc (vers 1400 ans avjc) à Ugarit, situé sur la côte syrienne…
Des constructions imposantes à Mari
À Mari (Tell Hariri, Syrie), les premières constructions remontent à la fin du IIIe millénaire avjc, vers 2850-2700 avjc, puis se prolongent au IIe millénaire avjc. On a découvert trois palais superposés et plusieurs temples élevés vers 2340 avjc, comme ceux d’Ishtar, d’Ishtarat ou de Ninni-Zaza.

Un premier palais imposant, qualifié de pré-sargonique, englobe des ateliers et des entrepôts. Il joue sans doute le rôle de centre marchand et économique du royaume. Parmi les multiples constructions de Mari, se trouve aussi un ensemble architectural isolé, qui se déploie autour d’une cour, et évoque un sanctuaire…
Le Temple Ovale de Khafadjé
Les temples de cette période, souvent recouverts par d’autres constructions, restent peu connus. Peu de traces subsistent des temples érigés à l’époque des premières dynasties archaïques… Parmi les vestiges de l’architecture sacrée de style sumérien, le plus connu est le temple Ovale de la cité de Khafadjé (ancienne Tutub), situé à l’époque en Babylonie (actuel Irak).
Pour commencer, les constructeurs du temple Ovale creusent une fosse de huit mètres de profondeur. Ils remblaient ensuite la fosse avec du sable avant de poser les fondations de l’édifice et d’élever les murs… On n’explique pas cet énorme travail préparatoire qui renvoie peut-être à des rites de fondation…

La juxtaposition de niveaux du temple Ovale de la cité de Khafadjé préfigure la tour à étages, la ziggourat… Voir aussi l’article La ziggurat mésopotamienne s’élance vers le Ciel…
Le principe architectural de la terrasse
Le temple Ovale de Khafadjé possède un double sanctuaire et marie tradition et nouveauté… Une grande cour intérieure, entourée par des entrepôts et des ateliers, permet d’organiser les cérémonies de culte. Un petit sanctuaire s’élève sur une terrasse…
La vaste cour s’intègre dans une enceinte ovale légèrement surélevée… Puis une deuxième enceinte, plus basse, abrite une deuxième construction, dont le plan rappelle celui d’une maison à cour centrale, sans doute un second sanctuaire. On honore alors au sein du temple la divinité représentée par un personnage humain…
D’après un dessin du temple de Sîn, le dieu Lune, vers 2600 ans avjc, Khafadjé, région de Diyâlâ, Babylonie ; et le troupeau sacré de la déesse Inanna, empreinte de sceau, temple de Sîn, IIIe millénaire avjc, Khafadjé, Irak actuel ; période des dynasties archaïques de Sumer, Mésopotamie. (Marsailly/Blogostelle)
Le Temple de Sîn, dieu Lune
Consacré à Sîn (ou Nanna), le dieu Lune, on élève à Khafadjé un autre temple bâti sur une terrasse. Les architectes conçoivent, là aussi, un ensemble de pièces qui ouvrent sur une cour centrale. Pour la salle principale, la cella, ils élaborent un vestibule, une entrée coudée, un podium et des annexes.
DES STATUES D’ORANTS VOUÉES AUX DIEUX
Selon la tradition de l’époque en Mésopotamie, les croyants se rendent dans les temples où ils peuvent déposer une statue vouée à leur divinité… Ainsi, le Temple Carré du dieu de la Végétation Abu abrite de nombreuses sculptures d’orants en prière…

Le temple d’Abu à Eshnunna dit temple Carré
À Eshnunna, sur le site de Tell Asmar (Irak actuel), les architectes érigent le temple d’Abu et son enceinte carrée d’où son nom de Temple Carré… Cet édifice sacré comprend trois espaces cultuels dédiés à une triade divine : Abu, divinité de la Verdure, sa parèdre et le fils d’Abu.
Le plan du temple d’Abu se déploie autour d’une cour centrale entourée de dépendances. Le sanctuaire prend la forme d’une cella en longueur et abrite un podium sur le mur du fond. Ce podium permet d’exposer les sculptures votives qui perpétuent les prières des fidèles.
Pour cela, on construit des banquettes en briques crues et plâtrées… Mais les dévots sont nombreux à déposer des ex-votos destinés aux dieux et, faute de place, on finit par les enterrer dans des cachettes… Cette époque inaugure aussi les commencements de l’art de la grande statuaire…

Les statues du temple d’Abu
Sur un groupe sculpté du temple d’Abu, un couple de dévots honore la divinité de la Verdure… Les artistes sculptent les personnages les mains jointes, dans l’attitude de la prière. Certaines de ces statues sont conservées dans les musées de Bagdad et de Chicago. Elles peuvent être sculptées dans le calcaire, le schiste, et l’albâtre. Il existe deux sortes d’albâtre : l’albâtre calcaire composé de calcite et l’albâtre gypseux riche en gypse.
Les orants aux grands yeux expriment la puissance du regard…
Les sculpteurs travaillent le rendu des traits dans l’esprit stylistique de la statuaire sumérienne. Les statues d’orants de cette époque arborent un front court, de très grands yeux, une ligne sobre pour le sourcil, un nez pointu assez petit, une bouche étroite qui parfois semble faire la moue, des épaules carrées, des coudes très pointus, des bras ramenés sur les côtés du corps…
D’après un orant, statuette votive, albâtre, vers 2750-2600 avjc, Eshnunna-Tell Asmar ; et une femme et un fidèle en prière, temple Carré du dieu Abu, albâtre, vers 2550-2600 avjc ; époque des dynasties archaïques de Sumer, Eshnunna-Tell Asmar, Irak actuel, Mésopotamie. (Marsailly/Blogostelle)
Les artistes utilisent des incrustations colorées
Les sculpteurs renforcent la puissance des regards grâce à des incrustations de bitume ou de pierres colorées. D’aspect pâteux et de couleur sombre, le bitume (hydrocarbures, résines et asphaltènes) existe en quantité dans le milieu naturel mésopotamien. On l’utilise pour confectionner des objets comme des vases, pour créer des motifs, pour rehausser des sculptures, ou encore le bitume peut servir de liant imperméable ou de colle.
Une statuaire aux formes stylisées et géométriques
À l’époque des dynasties archaïques, les sculpteurs créent une statuaire aux formes simplifiées et géométriques. Les personnages aux traits stylisés affichent une attitude frontale, fondée sur la ligne de l’axe du corps. La mise en valeur des yeux suggère l’importance du regard dans l’acte de dévotion…
D’après un orant, au visage et à la barbe en forme de trapèze, vers 2550-2600 avjc ; et un cachet zoomorphe, marbre, Tello-Girsu, Irak actuel ; époque des dynasties archaïques, Sumer, Mésopotamie. (Marsailly/Blogostelle)
Comme pour les personnages, l’art animalier des cachets révèle lui aussi un goût pour la géométrie et la stylisation…
Un art de la simplification géométrique
Ainsi, les yeux des orants sont énormes par rapport à la taille de leurs visages. Les incrustations renforcent l’impression d’une présence forte. Cette présence est encore accentuée par une franche frontalité… Et les artistes cultivent l’art de la simplification géométrique des formes…
Si les sculpteurs donnent à leurs figures des épaules très carrées et des coudes pointus, les orants portent une jupe en forme de cône qui contribuent encore à la géométrisation de leur silhouette. La barbe, la coiffure et le visage sont très stylisés et dessinent des lignes trapézoïdales, qui distinguent particulièrement ces pieux personnages sumériens…
Des personnages idéalisés…
Les sculpteurs exploitent la géométrie des formes et des volumes des corps, ce qui donne aux personnages une dimension idéale, symbolique voire spirituelle… La mise en valeur des yeux et l’attention portée à la puissance du regard exprime peut-être l’efficacité symbolique et mystique qui se rattache à l’acte de la prière…
D’après un homme en prière, barbe et robe en trapèze, albâtre, vers 2750–2600 avjc ; et Kur-lil en orant, haut personnage d’Uruk, vers 2500 avjc, temple de Ninhursag, Tell al-Ubaid, Irak actuel ; époque des dynasties archaïques, Mésopotamie. (Marsailly/Blogostelle)
Des scènes de banquet sacré
Au cours de la période des dynasties archaïques, on rencontre aussi des reliefs perforés caractéristiques de cette période… Ces ouvrages sculptés sont destinés peut-être à être accrochés sur les murs des sanctuaires à l’aide de clous ou bien ils participent au système de fermeture de portes… Il possèdent sans doute une signification votive ou rituelle…
La grande majorité de ces bas-reliefs représentent le thème du banquet sacré… Manger et boire en présence de la divinité, représentée elle-même ou non sur les reliefs, symbolise un acte majeur dans la célébration du culte. Le banquet relève du sacré, garanti le renouveau de la Nature et assure la prospérité du royaume grâce à la protection des dieux…
D’après le relief dit du Nouvel-An, vers-2700-avjc, Khafadjé – Ur ; et une scène de banquet, sceau de la reine Pû-abi, vers 2600 avjc, tombes royales d’Ur (Tell al-Muqayyar), actuel Irak ; époque des dynasties archaïques, Sumer, Mésopotamie. (Marsailly/Blogostelle)
Des porteurs chargés d’offrandes
Sur les bas-reliefs, les artistes représentent les chars royaux ou rituels, des serviteurs, des porteurs chargés d’offrandes, des scènes de libation, la divinité quand elle assiste aux célébrations et le banquet lui-même…
Les personnages sont brossés le torse nu et portent des sortes de pagnes à languettes, à hauteur des genoux. Un rendu schématique des formes, de la barbe et des coiffures anime ces tableaux sacrés interprétés en deux dimensions dans la pierre ou dans la terre cuite…

Parmi les festivités, la célébration du Nouvel An…
Il semble que le banquet mésopotamien a lieu en diverses occasions… Mais nous ne connaissons pas avec précision le calendrier, le déroulement et la signification de ces festivités. Nous savons que cette activité cultuelle se rapporte entre autres aux célébrations du Nouvel An, symbole du renouveau de la Nature. C’est un moment traditionnellement propice pour assurer la fertilité de la Terre et la prospérité du royaume pour l’année à venir…
Pendant un temps, le pays de Sumer se retrouve morcelé en différents territoires gérés par des cités-royaumes rivales… Puis, les premières dynasties d’Ur et de Lagash prennent le dessus et mènent la civilisation sumérienne à son apogée. L’architecture sacrée et palatiale comme les arts prennent alors une nouvelle dimension…
Article suivant : Les artistes sumériens exaltent la dévotion des souverains
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Merci pour ce partage très intéressant.
Bon dimanche 🙂
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Merci à vous 😊
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