Le Sacré en Égypte ancienne : la déesse Isis, icône universelle de Philae

D'après la déesse Isis, souveraine de Philae, histoire du sacré. (Marsailly/Blogostelle)

La déesse Isis à Philae, Osiris à Biggeh

En Haute Égypte, au Sud du pays, on élève un temple majestueux consacré à la déesse Isis-Hathor sur l’île de Philae, à l’époque des Nectanebo. En ce vaste sanctuaire, la grande déesse égyptienne, épouse d’Osiris et mère d’Horus, se fond à la déesse Hathor. Face au temple de la déesse Isis, se trouve celui d’Osiris, sur l’île de Biggeh… Le culte de la déesse Isis va perdurer à l’époque romaine, jusqu’au début du VIe siècle apjc…

Par Maryse Marsailly (@blogostelle)
– Publié le 13 octobre 2018 –

D'après la déesse Isis et son fils Horus Faucon, temple d'Isis, Philae, XXXe dynastie-époque romaine, île d'Aguilkia, Assouan, Égypte Ancienne. (Marsailly/Blogostelle)
D’après la déesse Isis et son fils Horus Faucon, temple d’Isis, Philae, XXXe dynastie-époque romaine, île d’Aguilkia, Assouan, Égypte Ancienne. (Marsailly/Blogostelle)

REPÈRES CHRONOLOGIQUES Époque Thinite vers 3400 – 2980 avjc. Ancien Empire vers 2980 – 2475 avjc. Moyen Empire vers 2160 – 1788 avjc. Nouvel Empire vers 1580 – 1090 avjc. Troisième période intermédiaire vers 1090 – 663 avjc. Basse Époque vers 663- 525 avjc. Époque Ptolémaïque 332 – 30 avjc. 30 avjc- IVe apjc : Époque de l’Empire romain. Chronologie détaillée de l’Égypte Ancienne

LE TEMPLE DE PHILAE CONSACRE LA DÉESSE ISIS-HATHOR

Les commencements du temple de la déesse Isis de Philae remontent à la Basse époque, sous la XXVIe dynastie et le règne d’Amasis. Puis la construction du sanctuaire s’enrichit sous la XXXe dynastie et les rois Nectanebo. Nectanebo Ier élève la porte du premier pylône et un kiosque au sud-ouest de l’île. La mère d’Horus est qualifiée de Souveraine et régente de Philae, où elle se fond avec la déesse Hathor…

D'après Le Temple de Philae, de David Roberts, 1838 apjc, aquarelle, XIXe siècle, Égypte Ancienne. (Marsailly/Blogostelle)
D’après Le Temple de Philae, de David Roberts, 1838 apjc, aquarelle, XIXe siècle, Égypte Ancienne. (Marsailly/Blogostelle)

Le temple de Philae installé sur l’île d’Aguilkia…
Les architectes égyptiens, dès l’origine, élèvent sur l’île de Philae le plus ambitieux sanctuaire égyptien consacré à la déesse Isis…

En 1974, le sanctuaire est démonté et transporté sur l’île d’Aguilkia, entre Louxor et Assouan, pour le sauver des eaux, grâce notamment à l’engagement de Christiane Desroches-Noblecourt, archéologue française et première femme égyptologue…

Les Ptolémaïques poursuivent les constructions à Philae
L’élevation du temple de Philae débute sous les Nectanebo. Puis les constructions se poursuivent à Philae sous le règne de Ptolémée II Philadelphe, à l’époque Ptolémaïque.

Les successeurs sur le trône d’Égypte et, ensuite, les empereurs romains, parachèvent encore la magnificence de cet important sanctuaire consacré à la déesse Isis…

D’après le temple d’Isis et ses pylônes, Philae, XXXe dynastie-époque romaine ; la déesse Isis et le roi Nectanebo II, relief calcaire peint, XXXe dynastie, Basse époque, Sérapeum de Saqqara ; et le pavillon Nectanebo, temple d’Isis de Philae, XXXe dynastie-époque romaine, île d’Aguilkia, Assouan ; Égypte Ancienne. (Marsailly/Blogostelle)

La grande déesse Isis-Hathor, Maîtresse des Jubilés
L’élévation des colonnes et les chapiteaux du sanctuaire d’Isis évoquent les lotus, les papyrus et la végétation des marais. Ces thèmes iconographiques rappellent ainsi le marécage primordial. Certains chapiteaux dits hathoriques arborent l’emblème de la déesse vache Hathor…

La déesse Isis, mère d’Horus et incarnation du trône Égypte s’approprie les attributs d’Hathor, divinité de la fécondité, de la beauté, de l’amour et de la musique. Les Grecs assimilent Hathor, déesse porteuse de joie, à Aphrodite.

D’après la déesse Isis, avec disque solaire, cobra et coiffe-trône, et Hathor, temple de Philae, XXXe dynastie-époque romaine, Aguilkia, Assouan, Égypte Ancienne. (Marsailly/Blogostelle)
D’après la déesse Isis, avec disque solaire, cobra et coiffe-trône, et Hathor, temple de Philae, XXXe dynastie-époque romaine, Aguilkia, Assouan, Égypte Ancienne. (Marsailly/Blogostelle)

Philae, symbole du culte universel d’Isis
Grande magicienne, la déesse Isis permet à son époux Osiris de ressusciter et de régner sur le monde de l’au-delà. Elle se transforme, à l’époque Ptolémaïque, en une divinité féminine universelle. Le temple de Philae, où elle règne en souveraine divine, en est le symbole…

Des inscriptions de Philae présentent d’ailleurs l’épouse d’Osiris comme la maîtresse des Jubilés, qui prolonge les années de celui (le roi) qui lui est consacré, ou encore qui prolonge les années de celui qui lui est dévoué (H. Junker, Pylon 76).

D’après des colonnes à motifs végétaux et hathoriques ; l’enfilade du temple d’Isis ; et des chapiteaux hathoriques, temple de Philae, XXXe dynastie-époque romaine, Aguilkia, Assouan, Égypte Ancienne. (Marsailly/Blogostelle)

LA DÉESSE ISIS RETROUVE OSIRIS DANS L’îLE DE BIGGEH

La procession d’Isis vers l’île de Biggeh
Au cours de la période d’activité cultuelle, tous les dix jours, l’effigie de la déesse Isis quitte le saint des saints du temple de Philae pour rejoindre le sanctuaire de son époux, Osiris, sur l’île de Biggeh (Senem en égyptien ancien).

Ce lieu sacré, nommé Abaton, abrite le tombeau mythique d’Osiris selon la tradition égyptienne. L’île de Biggeh se situe à quelques centaines de mètres de l’île de Philae…

D’après la déesse Isis dans sa barque de procession, relief en creu, temple de Philae, XXXe dynastie-époque romaine, île d'Aguilkia, Assouan, Égypte Ancienne. (Marsailly/Blogostelle)
D’après la déesse Isis dans sa barque de procession, relief en creu, temple de Philae, XXXe dynastie-époque romaine, île d’Aguilkia, Assouan, Égypte Ancienne. (Marsailly/Blogostelle)

Le Décret de l’Abaton de Biggeh
Dans le sanctuaire de Philae, des textes gravés sur la porte d’Hadrien, dits Décret de l’Abaton, précisent que nul être humain n’est autorisé à débarquer sur l’Abaton de Biggeh, un lieu hautement sacré.

Seul le grand prêtre et les membres du clergé se rendent chaque jour dans le temple d’Osiris pour prendre soin du dieu. Les inscriptions précisent que Dans sa barque, la déesse Isis s’y rendra tous les 10 jours pour y accomplir la libation… En revanche, il reste peu de vestiges du sanctuaire originel d’Osiris construit sous Ptolémée III…

Selon certains spécialistes, ce temple pourrait même remonter à une période antérieure à l’époque Ptolémaïque. Le sanctuaire d’Osiris est ensuite agrandi à l’époque romaine, comme l’illustre sa grande arche, sous le règne d’Auguste. Mais le saint des saints (le cœur spirituel du sanctuaire) a complètement disparu…

D’après Le Décret de l’Abaton, consigné par le dieu Thôt, porte d’Hadrien, temple de Philae ; le portique du temple de la déesse Isis, Philae, aquarelle de David Roberts, XIXe siècle ; et le temple d’Isis de Philae et ses pylônes, XXXe dynastie-époque romaine, île d’Aguilkia, Assouan, Égypte Ancienne. (Marsailly/Blogostelle)

Un lieu sacré silencieux et inaccessible
Dans le texte hiéroglyphique du Décret de l’Abaton, le dieu Thôt décrit le Bosquet sacré de l’île de Biggeh, qui entoure la tombe mythique du dieu Osiris. Thôt, scribe des dieux, divinité de la Sagesse et de la Lune, précise que les lieux ne manqueront pas de lait et que des offrandes sont faites 365 jours par an (par les prêtres).

Le décret déclare encore que cet endroit hautement sacré doit rester silencieux et inaccessible… Aucun homme ne devra jamais y pénétrer, ni personne y marcher« . La chasse comme la pêche y sont interdites dans un rayon de 40 coudées

D’après les vestiges de l’Abaton, temple de Biggeh, David Roberts, gravure peinte, 1838, XIXe siècle ; les ruines de l’île de Biggeh, tombeau mythique d’Osiris, document photographique, région d’Assouan, en Haute-Égypte ; et le hiéroglyphe désignant le dieu Osiris, Égypte Ancienne. (Marsailly/Blogostelle)

L’Abaton, tombeau mythique d’Osiris
Considéré, au II millénaire avjc, comme le tombeau mythique d’Osiris, le sanctuaire de l’Abaton possède une très haute importance. Abaton signifie inaccessible en grec. En Égyptien, on le désigne sous le nom de butte pure ou île pure

Par ailleurs, en égyptien on désigne encore l’île de Biggeh sous le terme de Senmet ou Senmout, qui désigne probablement une aire plus vaste que l’île-sanctuaire elle-même.

Biggeh est en effet entourée d’autres îles, ainsi que des terres cultivées de la région de la première cataracte, située à la frontière de la Nubie. Le culte voué à Osiris dans cette contrée a sans doute connu son apogée durant la Basse époque et l’époque Ptolémaïque…

D’après le tombeau mythique d’Osiris, sous la butte sacrée, surmontée d’un arbre, et le hiéroglyphe d’Osiris, stèle en grès, XXXe dynastie, époque ptolémaïque ; la déesse Isis et Ankh, qui redonne la Vie à son époux Osiris, relief, et Osiris et la déesse Isis ailée recevant des offrandes de pharaon, temple d’Isis, vers 380-300 apjc ;  temple d’Isis, Philae, XXXe dynastie-époque romaine, Aguilkia, Assouan, Égypte Ancienne. (Marsailly/Blogostelle)

La colline dite Butte d’Osiris, qui abrite la sépulture divine, renvoie au tertre primordial d’où émerge le Soleil le Premier Jour

Le bosquet sacré de l’Abaton
La végétation du bosquet sacré qui entoure la tombe d’Osiris, à Biggeh, comprend, à l’époque, plusieurs essences d’arbres, dont le verdissement évoque la résurrection. En outre, les arbres fruitiers symbolisent la fonction nourricière d’Osiris.

D’après l’arbre de Biggeh, dessin, porte d’Hadrien temple de Philae, XXXe dynastie-époque romaine, île d'Aguilkia, Assouan, Égypte Ancienne. (Marsailly/Blogostelle)
D’après l’arbre de Biggeh, dessin, porte d’Hadrien temple de Philae, XXXe dynastie-époque romaine, île d’Aguilkia, Assouan, Égypte Ancienne. (Marsailly/Blogostelle)

Le fruit du jujubier – la jujube – est comestible et le palmier-dattier produit des dattes. Le figuier-sycomore, qui avec l’acacia représente l’arbre de vie dans l’iconographie de l’Égypte Ancienne, produit des figues. Le décret de l’Abaton mentionne des offrandes de palmes et les dattes font l’objet d’une utilisation rituelle.

En savoir plus :  Ci-gît Osiris, L’Abaton de Biggeh d’après les sources textuelles et iconographiques, de Charly De Maré (voir le bloc-notes en bas de page).

Par ailleurs, le jujubier comme l’acacia portent des épines, ce qui contribue sans doute à écarter les intrus du tombeau sacré. Le jujubier se rapporterait à la symbolique du dieu de la Sagesse Thôt. Et le dieu Osiris est qualifié de Celui qui est dans l’acacia

D’après Osiris dans l’acacia, entouré par les déesses Isis et Nephtys, porte d’Hadrien, temple de Philae, XXXe dynastie-époque romaine, île d'Aguilkia, Assouan, Égypte Ancienne. (Marsailly/Blogostelle)
D’après Osiris dans l’acacia, entouré par les déesses Isis et Nephtys, porte d’Hadrien, temple de Philae, XXXe dynastie-époque romaine, île d’Aguilkia, Assouan, Égypte Ancienne. (Marsailly/Blogostelle)

Le palmier-dattier, symbole fertile et maternel
Le palmier-dattier possède une fonction maternelle, qui renvoie à la déesse Isis. On rencontre l’arbre sacré – sycomore ou palmier-dattier – sur les images funéraires, associé à une déesse céleste et nourricière. À Philae, les palmes et les dattes sont représentées sur les chapiteaux…

On rencontre aussi des images de palmier-dattier associé à la fécondité dans l’iconographie de l’Orient ancien… comme sur un relief de déesse-mère allaitant auprès de l’Arbre de Vie, ou encore sur une mosaïque de l’époque Byzantine, dans l’église dite du Siège de Marie, à Kathisma, non loin de Bethléem…

D’après un chapiteau, motif de palmes et dattes, temple d’Isis, Philae, XXXe dynastie-époque romaine, Aguilkia, Assouan, Égypte Ancienne ; et le palmier-dattier, mosaïque, église du Siège de Marie, Kathisma, proche de Bethléem, Cisjordanie, Palestine, période byzantine ; et un chapiteaux, motif végétal ; temple d’Isis de Philae, XXXe dynastie-époque romaine, Aguilkia, Assouan, Égypte Ancienne. (Marsailly/Blogostelle)(Marsailly/Blogostelle) Voir aussi l’article : 3 L’Arbre de Vie, un concentré du Cosmos Vivant.

L’arbre vénérable de Biggeh
Distinct du bosquet sacré, l’arbuste ou l’arbre qualifié de vénérable se dresse sur le tertre qui renferme la tombe mythique d’Osiris. Des inscriptions de Philae confirment que le sarcophage (d’Osiris) reverdit l’arbre iwy vénérable de Biggeh

L’arbre sacré vénérable symbolise ainsi une puissance verdoyante et nourricière… Il rappelle en outre que le dieu Osiris est à l’origine une divinité de la végétation, de l’agriculture et du blé, qui apporte renouveau et nourriture…

D’après le tombeau mythique d'Osiris, dite butte d'Osiris, relief, temple d'Amon, Karnak, Égypte Ancienne. (Marsailly/Blogostelle)
D’après le tombeau mythique d’Osiris, dite butte d’Osiris, relief, temple d’Amon, Karnak, Égypte Ancienne. (Marsailly/Blogostelle)

Un arbre miraculeux abrite la dépouille d’Osiris…
Dans la légende d’Osiris, le coffre renfermant la dépouille du dieu assassiné par son frère Seth se retrouve à Byblos, déposé là par les flots… Un arbre, dont la rapidité de la croissance semble miraculeuse, enveloppe alors le coffre dans son écorce, abritant et cachant ainsi les restes du dieu… que la déesse Isis retrouvera…

Osiris s’assimile aussi à un arbre de l’Occident 
Par ailleurs, le palmier-dattier serait la manifestation végétale des lymphes (les substances aqueuses) d’Osiris. Le dieu s’assimile aussi à un arbre de l’Occident (non défini) dans le rituel de l’embaumement. Pour les anciens égyptiens l’Occident désigne l’au-delà…Voir aussi l’article Le Sacré en Égypte ancienne, le culte solaire nourrit la symbolique funéraire

Osiris momifié repose sur le dos du crocodile
Sur l’un des reliefs de Philae, Osiris momifié repose sur le dos du crocodile, dans les marais, avant de renaître et de trôner, en présence de la déesse Isis et de son fils Horus. Le crocodile renvoie à Sobek, puissante divinité créatrice des eaux et de la fertilité…

D’après Isis, Horus, la momie d'Osiris sur le crocodile des marais, Abaton de Biggeh, relief, Porte d'Hadrien, temple d'Isis, Philae, île d'Aguilkia, Assouan, Égypte Ancienne. (Marsailly/Blogostelle)
D’après Isis, Horus, la momie d’Osiris sur le crocodile des marais, Abaton de Biggeh, relief, Porte d’Hadrien, temple d’Isis, Philae, île d’Aguilkia, Assouan, Égypte Ancienne. (Marsailly/Blogostelle)

Dans le mythe d’Osiris, la déesse Isis, avec l’aide d’Anubis, reconstituent la dépouille d’Osiris qui, après avoir été momifié, ressuscite et devient le souverain du royaume de l’au-delà et de l’éternité… Parfois c’est son fils Horus qui réveille son père Osiris…

Abydos, sanctuaire de la triade Osiris-Isis-Horus
Selon les traditions mythiques, ce serait sur l’île de Biggeh que le corps du dieu Osiris aurait été inhumé, après que son épouse Isis ait rassemblé ses membres épars.

Par ailleurs, la déesse aurait enseveli la tête de son époux à Abydos. Autre lieu saint, autre tombeau mythique, c’est à Abydos que l’on érige le plus important sanctuaire consacré à Osiris et à la triade Osiris-Isis-Horus…

D’après Osiris, la déesse Isis et Horus, la triade osirienne, relief de la cour, temple de Philae, XXXe dynastie-époque romaine, Aguilkia, Assouan, Égypte Ancienne. (Marsailly/Blogostelle)
D’après Osiris, la déesse Isis et Horus, la triade osirienne, relief de la cour, temple de Philae, XXXe dynastie-époque romaine, Aguilkia, Assouan, Égypte Ancienne. (Marsailly/Blogostelle)

Isis, Dame de la butte sacrée et Maîtresse de vie
Un hymne gravé sur le grand pylône du temple de Philae loue la déesse Isis comme une divinité suprême : vénérable Mère des dieux, donneuse de vie, maîtresse de Philae… puissante, souveraine des dieux… Adorée dans le ciel, souveraine des étoiles… Isis maîtresse de vie, dame de la butte sacrée, Souveraine et régente de Philae

Le texte sacré qualifie la déesse de dame de la butte sacrée. Cette colline renvoie à la fois au tombeau mythique d’Osiris, dit butte d’Osiris, représentée par ailleurs sur un relief du temple d’Amon à Karnak, et au tertre primordial d’où s’élève le Soleil au premier jour…

D'après Le temple de Philae, de David Roberts, aquarelle, 1838 apjc, XIXe siècle, Égypte Ancienne. (Marsailly/Blogostelle)
D’après Le temple de Philae, de David Roberts, aquarelle, 1838 apjc, XIXe siècle, Égypte Ancienne. (Marsailly/Blogostelle)

Osiris ressuscité (Onnophris) c’est aussi le Soleil renaissant chaque jour, comme une répétition du Premier jour et de la Première fois… Voir aussi l’article Le Sacré en Égypte ancienne, un dieu solaire aux multiples facettes

LA TRIADE D’ÉLÉPHANTINE HONORÉE À BIGGEH

Khnoum-Rê, Satis et Anouket-Anoukis
Si dans le temple de Biggeh on adore principalement Osiris-Onnophris (Osiris ressuscité) et son épouse Isis, qui forment une triade avec leur fils Horus, premier pharaon mythique, on rend également sur cette île-sanctuaire un culte à la triade divine de l’île d’Éléphantine…

Ce trio père-mère-enfant se compose de Khnoum-Rê, de Satet-Satis – assimilée à Sothis, Maîtresse de l’année et déesse qui se rattache à l’inondation annuelle – et de leur fille Anouket-Anoukis.

D’après la triade d’Éléphantine, Khnoum-Rê, Satet-Satis et Anouket-Anoukis, et Ramsès IV, XXe dynastie, île d’Éléphantine, Assouan, Égypte Ancienne. (Marsailly/Blogostelle)
D’après la triade d’Éléphantine, Khnoum-Rê, Satet-Satis et Anouket-Anoukis, et Ramsès IV, XXe dynastie, île d’Éléphantine, Assouan, Égypte Ancienne. (Marsailly/Blogostelle)

Anouket-Anoukis, déesse de la première cataracte
Sur un relief d’Éléphantine, le pharaon Ramsès IV, devant un autel chargé d’offrandes, accomplit une libation et encense la triade d’Éléphantine.

Le dieu Soleil apparaît sous la forme de Khnoum, à tête de bélier, la déesse Satis est coiffée de la Couronne Blanche du Sud et de deux cornes de gazelle, et leur fille, Anouket-Anoukis, porte une haute coiffe…

Déité de la première cataracte du Nil et Maîtresse de Nubie, on vénère encore Anouket-Anoukis dans son temple sur l’île de Sehel, qui lui est consacrée, non loin d’Assouan…

D’après la déesse Anouket-Anoukis, barque de procession, bois peint, et détail, vers 1250 avjc, XIXe dynastie, Nouvel Empire ; et la triade d’Éléphantine, Khnoum-Rê, Satis et Anouket-Anoukis, XXe dynastie, île d’Éléphantine, Assouan, Égypte Ancienne. (Marsailly/Blogostelle).

LE MAMMISI, CHAPELLE DE LA NAISSANCE DIVINE

Horus, dieu fils et dieu enfant
Le vaste sanctuaire de la déesse Isis de Philae se déploie sur 65 mètres de long… Le temple comprend des colonnades, qui mènent les visiteurs jusqu’au au premier pylône du sanctuaire,…

… dont les reliefs mettent en scène le roi Ptolémée XII (le père de Cléopâtre). Ce pharaon combat des ennemis captifs en présence d’Horus et de la déesse Isis portant la coiffe d’Hathor…

D'après la colonnade de la cour, temple de Philae, XXXe dynastie-époque romaine, Aguilkia, Assouan, Égypte Ancienne. (Marsailly/Blogostelle)
D’après la colonnade de la cour, temple de Philae, XXXe dynastie-époque romaine, Aguilkia, Assouan, Égypte Ancienne. (Marsailly/Blogostelle)

Une chapelle dédiée à Horus fils d’Isis
On pénètre ensuite dans la grande cour centrale, sur laquelle donne la chapelle consacrée à la naissance divine, le Mammisi. Ce sanctuaire est dédié à Horus enfant…

… Horus enfant est vénéré ici sous les traits du jeune Harpocrate grec ; de Hor sa Aset, qui désigne Horus fils d’Isis (Harsiesis en grec), et de Horsomtus, qui signifie Horus qui unit les Deux Terres, en tant que fils d’Hathor et du dieu Faucon Horus d’Edfou.

Par ailleurs, dans l’immense sanctuaire dédié à la déesse Hathor à Dendéra, qui consacre aussi la déesse Isis, se trouve un Mammisi voué à la naissance de la déesse Isis…

D’après le Mammisi voué à la déesse Isis, temple de la Naissance, sanctuaire d’Hathor, Dendéra, époque de Pépi Ier aux rois Ptolémaïques ; l’entrée du Mammisi, temple d’Isis de Philae, sous Ptolémée III Evergète Ier, XXXe dynastie-époque romaine ; et une vue intérieure du temple de la déesse Isis, Philae, XXXe dynastie-époque romaine ; île d’Aguilkia, Assouan, Égypte Ancienne. (Marsailly/Blogostelle)

De la salle hypostyle à la chapelle d’Osiris
À Philae, un second pylône conduit ensuite à une vaste salle hypostyle à 10 colonnes – hypostyle signifie que le plafond est supporté par des colonnes. Cet espace s’ouvre sur cinq salles et aussi sur un imposant passage, dit passage de Tibère, qui mène à une porte reliée au mur d’enceinte du temple d’Isis.

Un escalier conduit à la chapelle d’Osiris, dont les fresques évoquent le cortège funéraire du dieu. Des bas-reliefs représentent la déesse Isis, son époux Osiris et leur fils Horus, premier pharaon mythique.

D’après le temple de la déesse Isis, Philae, illustration de David Roberts, XIXe siècle ; le temple de Philae, enfilade et colonnes, cour et pylône ; XXXe dynastie-époque romaine, déplacé sur l’île d’Aguilkia, Assouan, Égypte Ancienne. (Marsailly/Blogostelle)

Des constructions de l’époque romaine
Par ailleurs, au nord de l’ensemble du temple de Philae, se trouve le temple d’Auguste et l’arc de triomphe de Dioclétien. Un petit temple est encore consacré à la déesse Hathor, avec laquelle s’identifie par ailleurs la déesse Isis.

En ces lieux sacrés, se distingue aussi le pavillon quadrangulaire de Trajan, orné de 14 colonnes aux chapiteaux variés. La porte d’Hadrien, à l’ouest de l’île, correspond aux vestiges d’un sanctuaire dédié à Osiris, disparu de nos jours. Seuls subsistent une entrée monumentale élevée par l’empereur Hadrien et deux murs latéraux.

D’après le temple d’Hadrien et le kiosque de Trajan et le temple d’Isis de Philae, la cour, XXXe dynastie-époque romaine, déplacé sur l’île d’Aguilkia, Assouan, Égypte Ancienne. (Marsailly/Blogostelle)

Cette chapelle d’Osiris fait face, à l’origine, à l’île de Biggeh, où se trouve le sanctuaire du dieu et sa tombe mythique. Parmi les inscriptions de La porte d’Hadrien, l’une d’elle est considérée comme étant le dernier texte hiéroglyphique connu (daté fin IVe siècle-IIIe siècle apjc)… Voir aussi L’Art de l’Égypte ancienne, les images et les hiéroglyphes perpétuent l’essence de l’éternel

DE PHILAE À POMPÉI

On honore la déesse Isis jusqu’au début du VIe siècle apjc
Les temples de Philae, consacré à la déesse Isis, d’Edfou, dédié au dieu Faucon Horus, et d’Abydos, voué à Osiris, figurent parmi les sanctuaires de l’époque Ptolémaïque les mieux conservés.

D’après le temple de Philae consacré à la déesse Isis, XXXe dynastie-époque romaine, île d'Aguilkia, Assouan, Égypte Ancienne. (Marsailly/Blogostelle)
D’après le temple de Philae consacré à la déesse Isis, XXXe dynastie-époque romaine, île d’Aguilkia, Assouan, Égypte Ancienne. (Marsailly/Blogostelle)

Le temple d’Isis à Pompéi
La déesse Isis, devenue très populaire, le reste encore à l’époque romaine… On élève notamment un majestueux petit temple d’Isis à Pompéi… Cependant, ce sanctuaire de Pompéi ne résiste pas, en 62 apjc, à un  tremblement de terre qui le dévaste. Il sera ensuite restauré, mais de manière incomplète.

L’édifice a conservé son podium, son portique, des colonnes, sa cella (la grande salle) et le sanctuaire réservé aux prêtres. Malgré ses dimensions modestes, le temple d’Isis de Pompéi impressionne…

L’admiration de Gérard de Nerval
Ainsi, au XIXe siècle, le poète Gérard de Nerval (1808-1855) raconte dans Les Filles du feu, Isis, 1854 : Un des spectacles les plus curieux fut la cérémonie qui s’exécuta au coucher du soleil dans cet admirable petit temple d’Isis, qui, par sa parfaite conservation, est peut-être la plus intéressante de ces ruines…

D’après les vestiges du temple d’Isis à Pompéi, et maquette, Ier siècle apjc, Italie, époque Romaine ; et un plan du sanctuaire de Philae, temple d’Isis, dessin, XIXe siècle.  (Marsailly/Blogostelle)

Le temple d’Isis fermé sur ordre de Justinien
Ainsi, jusqu’en 551 apjc, date de sa fermeture par l’empereur Justinien, le grand temple d’Isis de Philae reste l’un des plus importants de l’Égypte ancienne et de la Nubie.

Le culte de la déesse Isis perdure donc jusqu’au milieu du VIe siècle apjc à Philae, alors que, par ailleurs, des temples égyptiens sont fermés après le décret de Théodose en 391 apjc, au IVe siècle, dans une Égypte christianisé qui devient copte…

D’après la déesse Isis, Horus et le roi Ptolémée XII Néos Dionysos, Philae, XXXe dynastie ; et des hiéroglyphes, IVe-IIIe siècle apjc, porte d’Hadrien, temple d’Isis de Philae, île d’Aguilkia, XXX dynastie-époque romaine, Assouan, Égypte Ancienne. (Marsailly/Blogostelle)

Épouse du dieu Osiris, mère du jeune dieu Horus, la déesse Isis incarne le trône d’Égypte, la fécondité et la maternité. Le culte de la déesse Isis, souveraine de Philae et maîtresse de vie se propage dans le monde gréco-romain où elle acquiert une dimension universelle… Plutarque évoque la déesse Isis Qui a dix mille noms. Et le nom hébreu d’Ève, la vivante, rappelle l’essence de la déesse, mère du vivant

Article suivant : Le Sacré en Égypte ancienne, la déesse Isis aux Dix mille noms (première partie)

Consulter Sommaire Histoire du sacré

Consulter Le sommaire DU BLOG

Bloc-notes + : Ci-gît Osiris, L’Abaton de Biggeh d’après les sources textuelles et iconographiques, de Charly De Maré – aspirant FNRS – F.R.S/ASP – FNRS-F.R.S Research Fellow, doctorant en Langues et lettres (égyptologie) – PhD Candidate in Literary Studies (Egyptology).

pdf : cdn.uclouvain.be/groups/cms-editors-ciol/01-C.%20De%20Mar%C3%A9,%20Ci-g%C3%AEt%20Osiris,%20l%E2%80%99Abaton%20de%20Biggeh.pdf

Philixte  –  Centre interdisciplinaire d’étude des religions et de la laïcité (CIERL) : ulb.be – cierl.ulb.ac.be/index.php ;  Laboratoire UMR 8546 CNRS-ENS, « Archéologie et Philologie d’Orient et d’Occident » (AOrOc) archeo.ens.fr

Publié par Maryse Marsailly

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