L’Art de l’Égypte ancienne. Les créations originales de Nagada et la lumineuse civilisation des pharaons

D'après la déesse Maât, histoire de l'art, Égypte ancienne.(Marsailly/Blogostelle)

Les artistes égyptiens de l’antiquité expriment l’Éternité…

L’Égypte des Pharaons. Il est difficile de ne pas succomber à la magie colossale de l’art égyptien, avec ses peintres, ses sculpteurs et ses grands bâtisseurs de temples, de pyramides et de tombeaux… Un art essentiellement tourné vers l’au-delà, d’abord réservé aux pharaons, rois de Haute et Basse Égypte et à la famille royale. Puis l’art funéraire se démocratise au fil du temps pour les notables et les artisans. Le grand dieu Amon-Ré et la triade Isis-Osiris-Horus animent le monde spirituel égyptien habité par de multiples divinités…

Par Maryse Marsailly (@blogostelle)
– Dernière mise à jour janvier 2024-

D'après le sphinx de Gizeh, près de la pyramide de Khéphren, roi de la IVe dynastie sous l’Ancien Empire, Égypte ancienne. (Marsailly/Blogostelle)
D’après le sphinx de Gizeh, près de la pyramide de Khéphren, roi de la IVe dynastie sous l’Ancien Empire, Égypte ancienne. (Marsailly/Blogostelle)

REPÈRES CHRONOLOGIQUES. Époque de Nagada : vers 4000 ans avjc. Époque Thinite vers 3400-2980 avjc – apparition de l’écriture vers 3200 avjc Ancien Empire 2980-2475 avjc. Chronologie L’Égypte Ancienne

LES CRÉATIONS ORIGINALES DE NAGADA

Les rives du Nil sont occupées depuis les temps les plus reculés de l’Humanité… Entre 4000 et 3200 ans avjc environ, avant l’époque des premiers pharaons, une culture originale s’épanouit dans la vallée du Nil : la civilisation de Nagada. Des objets accompagnent les défunts dans l’Autre Monde…

D’après une palette à fard dite aux chiens, vers 3300-3200 avjc, période de Nagada, schiste sculpté en bas-relief, Égypte ancienne. (Marsailly/Blogostelle)
D’après une palette à fard dite aux chiens, vers 3300-3200 avjc, période de Nagada, schiste sculpté en bas-relief, Égypte ancienne. (Marsailly/Blogostelle)

La signature originale de l’art égyptien

Dès les origines, les artistes égyptiens affirment leur talent, leur créativité et un savoir-faire exceptionnel. Nous sommes sur les rives du Nil, à l’époque de Nagada, vers 3300-3200 avjc. Le décor sculpté d’un poignard en ivoire d’hippopotame témoigne déjà de l’art déjà abouti des artistes de Nagada…

Les tombes de Nagada

Situé en Moyenne Égypte, le site de Nagada comprend 2200 tombes dans lesquelles reposent des hommes et des femmes repliés en position fœtale. Une disposition des défunts qui remonte à la lointaine Préhistoire, peut-être reliée à la croyance en une renaissance dans la matrice terrestre ou céleste…

D’après une poterie décorée de gazelles, terre cuite et des vases en basalte, pierre polie, vers 4000-3500 avjc, période de Nagada, Égypte ancienne. (Marsailly/Blogostelle) ; et

Des défunts accompagnés d’un mobilier personnel

Auprès des dépouilles de Nagada, on dépose là des objets personnels. Vases en terre cuite et en pierre avec de la nourriture, nécessaire de toilette comme de belles palettes à fard sculptées en bas-relief dans le schiste, des peignes et des épingles en ivoire, des bijoux et des amulettes en coquillage accompagnent les défunts dans leur dernière demeure.

D’après un vase en terre cuite, à engobe rouge et noir et motif gravé de gazelle, 4000-3500 avjc, période de Nagada, Égypte ancienne. (Marsailly/Blogostelle)

Nagada préfigure l’originalité artistique égyptienne

Dans les tombes de Nagada, on dépose aussi des armes telles des lames de silex très soigneusement polies, des têtes de massue, des figurines en os, parfois des statues dans les sépultures les plus luxueuses, des vases en terre cuite à engobe rouge et noir…

D’après un poignard en ivoire d’hippopotame sculpté et lame de silex, vers 3300-3200 avjc, période de Nagada, Gebel el-Arak, Égypte ancienne. (Marsailly/Blogostelle)
D’après un poignard en ivoire d’hippopotame sculpté et lame de silex, vers 3300-3200 avjc, période de Nagada, Gebel el-Arak, Égypte ancienne. (Marsailly/Blogostelle)

Le savoir-faire exceptionnel des artistes égyptiens

Même si une influence orientale est perceptible, de nombreuses créations témoignent du talent abouti des artistes de Nagada. Au moment de l’apparition de l’écriture puis sous l’Ancien Empire, la culture et l’art de l’Égypte possèdent déjà une tradition artistique et culturelle originale.

Les potiers réalisent des vases en terre cuite aux lignes élégantes, parfois à engobe rouge et noir, décorés de motifs gravés. Les artisans excellent aussi à travailler la pierre polie. Les tailleurs de pierre n’hésitent pas à sculpter des matériaux difficiles, comme l’ardoise et l’ivoire, qui sont des matériaux très friables.

D'après le poignard de Gebel el-Arak, ivoire sculpté, 3300-3200 avjc, période prédynastique de Nagada, Égypte Ancienne. (Marsailly/Blogostelle)
D’après le poignard de Gebel el-Arak, ivoire sculpté, 3300-3200 avjc, période prédynastique de Nagada, Égypte Ancienne. (Marsailly/Blogostelle)

Les artistes de Nagada créent des formes simples qu’ils adaptent à leur matière, tout en leur donnant déjà une grande monumentalité, même sur des petites dimensions.

Comme pour le Poignard du Gebel el-Arak, qui mesure seulement 25,5 centimètre de long environ, ou pour la palette à fard, dite aux chiens, de presque 18 centimètre de haut, sculptée dans le schiste.

Le poignard du Gebel el-Arak, dont la poignée est sculptée en ivoire d’hippopotame, est pourvue d’une lame de silex, finement taillée et travaillée.

D’après le décor sculpté d’un poignard, détail, ivoire d’hippopotame, vers 3300-3200 avjc, période de Nagada, Gebel el-Arak, Égypte ancienne. (Marsailly/Blogostelle)
D’après le décor sculpté d’un poignard, détail, ivoire d’hippopotame, vers 3300-3200 avjc, période de Nagada, Gebel el-Arak, Égypte ancienne. (Marsailly/Blogostelle)

Une grande précision du dessin

Sur l’une des faces du poignard du Gebel el-Arak, l’artiste représente des animaux autour d’une bosse de préhension (pour tenir l’objet en main). De l’autre côté, il illustre une scène de bataille. Ces compositions tout en finesse sont exécutées avec une grande précision du dessin.

LA CIVILISATION DES PHARAONS

Parmi les sources antiques qui nous renseignent sur cette période, la plus importante provient de Manéthon. Ce prêtre et historien égyptien du IIIe siècle avjc rédige une histoire de l’Égypte pharaonique en langue grecque, à l’époque de Ptolémée Ier. Manéthon répartit les pharaons en trente dynasties…

D’après Amon-Rê et Mout, dieux de Thèbes, groupe statuaire dédicacé par Mérymaât, vers 1550 - 1069 avjc, Nouvel Empire, Égypte ancienne. (Marsailly/Blogostelle)
D’après Amon-Rê et son épouse Mout, dieux de Thèbes, groupe statuaire dédicacé par Mérymaât, vers 1550 – 1069 avjc, Nouvel Empire, Égypte ancienne. (Marsailly/Blogostelle)

Amon-Ré, dieu souverain solaire, la déesse Mout et leur fils Khonsou forment la triade suprême de Thèbes, dans la région actuelle de Karnak et Louxor…

Les dynasties pharaoniques de Manéthon

Le classement des dynasties pharaoniques de Manéthon fonde les recherches modernes, même si les éléments transmis par les auteurs anciens sont confrontés aux découvertes archéologiques et aux études relatives à l’épigraphie… L’épigraphie analyse les inscriptions gravées dans la pierre et le métal…

L’épigraphie qui se rattache à l’histoire permet d’étudier davantage les anciennes civilisations, sachant que la grande majorité des témoignages périssables ont disparu (bois, support végétal, tissus…) Par ailleurs, les spécialistes ne cessent de progresser dans la connaissance de la langue et de l’écriture hiéroglyphique de l’ancienne Égypte…

D'après le hiéroglyphe Per-aa, pour pharaon. (marsailly/blogostelle)
D’après le hiéroglyphe Per-aa, pour pharaon. (Marsailly/blogostelle)

Le nom de pharaon, mentionné dans la bible, est utilisé tardivement pour désigner le roi d’Égypte. Pharaon provient du vocable per-Aâ qui signifie la grande maison, le palais, la résidence royale… Selon le procédé sémantique égyptien courant, le contenant permet de nommer le contenu.

La civilisation pharaonique perdure 3000 ans

Ancien Empire, Moyen Empire, Nouvel Empire…

Les historiens distinguent plusieurs grandes époques définies comme trois empires : Ancien Empire, Moyen Empire et Nouvel Empire. Entre ces périodes fastes, quand l’Égypte est unie et bien organisée sous l’autorité de Pharaon, se trouvent des périodes dites intermédiaires, parfois parsemées de troubles sociaux et politiques…

Ainsi, se succèdent trente dynasties de pharaons jusqu’à l’arrivée en Égypte d’Alexandre Le Grand en 332 avjc. Ouverte sur le monde méditerranéen grec, puis italique, à l’époque de l’influence romaine entre 30 avjc et 395 apjc, l’Égypte antique finira par perdre son identité si particulière et son rayonnement passé…

D’après la déesse Maât qui déploie ses ailes, tombe de Nefertari, épouse de Ramsès II (vers 1294 -1224 avjc), XIXe dynastie, Nouvel Empire, Vallée des Reines, Louxor, Égypte ancienne. (Marsailly/Blogostelle)
D’après la déesse Maât qui déploie ses ailes, tombe de Néfertari, épouse de Ramsès II (vers 1294 -1224 avjc), XIXe dynastie, Nouvel Empire, Vallée des Reines, Louxor, Égypte ancienne. (Marsailly/Blogostelle)

La déesse Maât protège Pharaon, berger des hommes

Garante de l’Équilibre Universel et de la Justice, la déesse Maât, dont le nom signifie Vérité, veille sur Pharaon… Dans la tradition égyptienne, c’est le roi qui apporte force, équité, abondance et prospérité dans la Vallée du Nil…. Les écrits d’un texte précisent que sans pharaon les hommes sont un troupeau sans berger et c’est alors le règne du désordre et le retour au chaos

Selon la mythologie égyptienne, le fils d’Isis et Osiris, Horus, incarne le premier pharaon. Victorieux contre les forces du désordre, incarnées par son oncle Seth, le jeune et vigoureux Horus représente le modèle royal par excellence qui règne sur les Deux Terres. Le symbole de l’équilibre et de l’unification de la Haute et de la Basse Égypte se matérialise dans la double couronne, rouge et blanche, le Pschent

D’après Horus couronné du Pschent, premier pharaon mythique, papyrus d’Ani, XIXe dynastie, vers 1319 - 1196 avjc, Nouvel Empire, Égypte ancienne. (Marsailly/Blogostelle)
D’après Horus couronné du Pschent, premier pharaon mythique, papyrus d’Ani, XIXe dynastie, vers 1319 – 1196 avjc, Nouvel Empire, Égypte ancienne. (Marsailly/Blogostelle)

Pharaon, roi de Haute- Égypte et de Basse-Égypte

Selon le protocole égyptien, le roi possède cinq noms sous la tutelle divine. La mission essentielle de Pharaon est d’unifier le pays du Sud au Nord et ainsi de régner à la fois sur la Haute et la Basse- Égypte.

Le hiéroglyphe PER-AA signifie pharaon, un mot qui vient du grec pharao. Il traduit le mot biblique selon l’ancien égyptien per pour maison. Associé à l’adjectif aa qui signifie grand, l’ensemble désigne la grande maison, c’est-à-dire le palais. Celui qui habite le palais est le souverain…

D’après Nekhbet, coiffée de la couronne blanche du Sud, déesse vautour de la Haute-Égypte, bronze, vers 664 – 332 avjc, Basse Époque ; et Ouadjet, coiffée de la couronne rouge du Nord, déesse-cobra de la Basse-Égypte, bois peint, vers 664 – 332 avjc, Basse Époque ; Égypte ancienne. (Marsailly/Blogostelle)

Les insignes royaux confèrent puissance et vitalité à pharaon

Parmi les principaux insignes royaux de pharaon, figurent la Couronne Blanche et la Couronne Rouge, la double couronne nommée Pschent, la barbe postiche, le sceptre heqa (à crochet) et le fouet Nekhekh (à triple lanière), le symbole de Vie Ânkh (en forme de croix ansée), dont le hiéroglyphe signifie Vie

Le roi peut aussi recevoir des dieux le sceptre Ouas, symbole de la puissance divine et insigne de pouvoir. Le sceptre Ouas prend la forme d’un long bâton, fourchu en bas, surmonté d’une tête de canidé associée à Seth, dieu violent et imprévisible dont la force guerrière est redoutable…

D’après la couronne blanche du Sud, Haute- Égypte, statue colossale du roi Aménophis III, vers 1391 – 1353 avjc, XVIIIe dynastie, temple funéraire, Thèbes, Nouvel Empire ; et la couronne rouge du Nord, Basse-Égypte, roi Montouhotep II, vers 2010 – 1998 avjc, XIe dynastie, Moyen Empire ; Égypte ancienne. (Marsailly/Blogostelle)

L’uraeus, le cobra royal, protège pharaon, prêt à fondre sur ses ennemis… On rencontre aussi l’uraeus, symbole de puissance foudroyante, au front des divinités égyptiennes…

Sur un relief peint du temple de Seti Ier, le dieu de la sagesse et des savoirs brandit un double l’uræus, sceptre royal formé par deux cobras s’enroulant autour de tiges de lotus et de papyrus.

D'après le dieu Thot brandissant un double l'uræus, insigne royal protecteur de la Haute et de la Basse Égypte, temple Sethi Ier, Abydos, XIXe dynastie, Nouvel Empire, Égypte ancienne. (Marsailly/Blogostelle)
D’après le dieu Thot brandissant un double l’uræus, insigne royal protecteur de la Haute et de la Basse Égypte, temple Sethi Ier, Abydos, XIXe dynastie, Nouvel Empire, Égypte ancienne. (Marsailly/Blogostelle)

Le papyrus renvoie à la déesse cobra Ouadjet coiffée de la Couronne Rouge de la Basse -Égypte. Le lys ou lotus renvoie à la déesse Vautour Nekhbet arborant la Couronne Blanche de la Haute-Égypte. Ces deux cobras protègent les Deux-Terres et symbolisent l’unité du royaume d’ Égypte…

La Basse -Égypte : le Nord du pays (Delta), la déesse Cobra Ouadjet, l’ancestrale et guerrière déesse Neith, la Couronne Rouge, symbole l’Abeille, et plante emblématique le papyrus. La Haute-Égypte : le Sud du pays, la déesse Vautour Nekhbet, la Couronne Blanche, symbole le Jonc (roseau) et plante emblématique le lys ou lotus. Le roi de Haute et Basse-Égypte est Celui qui appartient au jonc et à l’abeille, dont le pouvoir royal s’exprime dans la double couronne, le Pschent…

LE SPHINX, IMAGE VIVANTE DU DIEU SUR TERRE

Symbole de la double identité de Pharaon, à la fois être humain et divinité, le sphinx colossal associe un corps de lion au visage royal… Ce thème renvoie à l’image vivante, le ssp-ankh égyptien, qui devient sphinx en grec…

D'après le sphinx de Gizeh, près de la pyramide de Khéphren, roi de la IVe dynastie sous l’Ancien Empire. (Marsailly/Blogostelle)
D’après le sphinx de Gizeh, près de la pyramide de Khéphren, roi de la IVe dynastie sous l’Ancien Empire. (Marsailly/Blogostelle)

Le sphinx, corps de lion et visage royal

Pour les anciens égyptiens, pharaon incarne l’image vivante du dieu sur terre… Le roi interprète et accomplit la volonté divine avec laquelle il se confond. Ainsi, les artistes égyptiens de l’Ancien Empire expriment la présence d’une force invincible et impérissable dans leurs créations artistiques…

Symbole de la puissance pharaonique, le sphinx de Tanis (musée du Louvre) provient du temple d’Amon-Rê, à Tanis, la capitale des XXIe et XXIIe dynasties, à l’époque de La Troisième période intermédiaire…

D’après le Sphinx de Giseh, la stèle de Thoutmosis IV entre ses pattes de lion, Égypte ancienne. (Marsailly/Blogostelle)
D’après le Sphinx de Giseh, la stèle de Thoutmosis IV entre ses pattes de lion, Égypte ancienne. (Marsailly/Blogostelle)

Des rois successifs réutilisent le monument

Cette impressionnante sculpture porte plusieurs inscriptions successives aux noms des pharaons Amenemhat II sous la XIIe dynastie (vers 1929-1895 avjc) ; Mérenptah sous la XIXe dynastie (vers 1212-1202 avjc) et Chéchonq Ier sous la XXIIe dynastie (vers 945-924 avjc).  Les inscriptions originales du sphinx de Tanis sont effacées en les martelant…

Des rois successifs réutilisent ainsi le monument à leur profit et à leur image. Par ailleurs, des spécialistes interprètent certains détails de cette immense œuvre de pierre comme des traces qui laissent penser qu’elle remonterait à une époque bien plus reculée, peut-être sous l’Ancien Empire, vers 2600 avjc…

D’après le Sphinx de Tanis en granit, une sculpture qui remonte peut-être à l'Ancien Empire, vers 2600 avjc, Égypte ancienne. (Marsailly/Blogostelle)
D’après le Sphinx de Tanis en granit, une sculpture qui remonte peut-être à l’Ancien Empire, vers 2600 avjc, Égypte ancienne. (Marsailly/Blogostelle)

Le sphinx de Gizeh tourné vers le soleil levant

Un monument gigantesque et mystérieux

Autre réalisation grandiose et monumentale, le sphinx de Gizeh taillé dans le calcaire et orienté vers l’Est, au soleil levant. Le sphinx de Gizeh se trouve tout proche du temple et de la pyramide de Khéphren (ou Khéphrem). Ce roi de la IVe dynastie est le fils du célèbre Khéops et le frère de Didoufri.

La pyramide et le temple de Didoufri sont élevés à Abou Roach, à plusieurs kilomètres des grandes pyramides de Gizeh. Le roi Didoufri se fait représenter lui aussi sous le figure du sphinx dans la statuaire. La date précise de l’élévation du gigantesque sphinx de Gizeh conserve une part de mystère, comme cette créature elle-même mythique et énigmatique…

D’après le sphinx de Gizeh coiffé du royal Némès, élevé non loin de la pyramide de Khéphren, roi de la IVe dynastie sous l’Ancien Empire ; et la stèle du songe de Thoutmosis IV (vers 1401 -1391 avjc),  XVIIIe dynastie, Nouvel Empire ; Égypte ancienne. (Marsailly/Blogostelle)

Coiffe royale et insigne de la royauté, on reconnaît le Némès à ses deux pans de tissu rayé… Il est surmonté de l’uraeus, le cobra protecteur…

Le jeune Thoutmosis IV rencontre le sphinx en songe…

Le sphinx de Gizeh tient entre ses pattes de lion une stèle érigée par Thoutmosis IV. Ce pharaon de la XVIIIe dynastie (Nouvel Empire) immortalise un songe qu’il a fait quand il était encore un jeune prince. Dans son rêve, le sphinx demande à Thoutmosis IV de le libérer des sables qui le submergent et lui promet en retour d’accéder au trône et de régner…

D’après la stèle du songe de Thoutmosis IV (vers 1401 -1391 avjc),  XVIIIe dynastie, Nouvel Empire, Égypte ancienne. (Marsailly/Blogostelle)
D’après la stèle du songe de Thoutmosis IV (vers 1401 -1391 avjc),  XVIIIe dynastie, Nouvel Empire, Égypte ancienne. (Marsailly/Blogostelle)

« Vois l’état où je suis, et mon corps douloureux, moi le maître du plateau de Gizeh ! Le sable du désert sur lequel je trône s’avance vers moi ; aussi dois-je me hâter de te confier la réalisation de mes vœux, car je sais que tu es mon fils qui va me protéger… » (stèle du songe de Thoutmosis IV)

L’uraeus, cobra divin protecteur de pharaon

Une tête du pharaon Didoufri provient d’une statue de sphinx, retrouvée parmi d’autres modèles souvent brisés, sur le site d’Abou Roach. Le visage royal est surmonté de l’uraeus, le cobra divin qui protège le roi, prêt à fondre sur les ennemis de pharaon et à cracher son venin… Par ailleurs, plusieurs images royales qui adoptent la figure du sphinx évoquent une attitude d’offrande…

D’après le pharaon Didoufri, à tête de sphinx, vers 2565 - 2558 avjc, IVe dynastie, Ancien Empire, Égypte ancienne. (Marsailly/Blogostelle)
D’après le pharaon Didoufri, à tête de sphinx, vers 2565 – 2558 avjc, IVe dynastie, Ancien Empire, Égypte ancienne. (Marsailly/Blogostelle)

Le sphinx égyptien versus le sphinx grec

Le sphinx égyptien est l’image vivante du dieu sur terre

Si le sphinx symbolise l’image vivante du dieu sur terre pour les égyptiens, celui de la tradition grecque possède une forme et une dimension différente. Le sphinx égyptien évoque le colossal mystère du divin et de l’éternité… Le sphinx grec place l’être humain face à la réalité de sa condition, à la fragilité de son existence et aux exigences de sa destinée…

Le sphinx grec confronte Œdipe à son tragique destin

Le sphinx de Thèbes possède un visage et un buste de femme, un corps de lion et des ailes d’oiseau… Lorsque cette créature mythique demande à Œdipe : Quel est l’être doué de la voix qui a quatre pieds le matin, deux à midi et trois le soir ?

D’après le sphinx de Gizeh coiffé du royal Némès, élevé non loin de la pyramide de Khépren, roi de la IVe dynastie sous l’Ancien Empire, Égypte ancienne. (Marsailly/Blogostelle)
D’après le sphinx de Gizeh coiffé du royal Némès, élevé non loin de la pyramide de Khépren, roi de la IVe dynastie sous l’Ancien Empire, Égypte ancienne. (Marsailly/Blogostelle)

Le héros répond avec justesse qu’il s’agit de l’Homme (l’être humain) qui, enfant, marche à quatre pattes, adulte, marche sur ses deux jambes et, vieux, s’aide d’une canne… Une fois l’énigme résolue, le sphinx se tue…

Grâce à son intelligence, Œdipe libère la cité de Thèbes du monstrueux sphinx qui dévore tous ceux qui sont incapables de répondre à ses énigmes… Mais Œdipe se retrouve confronté à son tragique destin…

La légende d’Œdipe conte comment le héros, sans le savoir, tue son père Laïos, le roi de Thèbes. Puis sans le savoir, épouse sa mère, Jocaste, après avoir résolu l’énigme du sphinx de Thèbes …

D’après Œdipe et le sphinx, coupe attique à figures rouges, vers 470-460 avjc, Grèce antique. (Marsailly/Blogostelle)
D’après Œdipe et le sphinx, coupe attique à figures rouges, 470-460 avjc, Grèce antique. (Marsailly/Blogostelle)

Ainsi s’accomplit la funeste prédiction de l’oracle de Delphes que Laïos avait, en vain, tenté d’éviter en abandonnant son fils… recueilli et élevé par Polybos, roi de Corinthe. Apprenant la vérité, Jocaste se donne la mort et Œdipe se perce les yeux. Il part pour une vie d’errance, accompagné de sa fille Antigone…

PHARAON, FILS DE RÊ ET INCARNATION D’HORUS

La mythologie solaire éclaire les tombeaux pharaonique

Selon la tradition égyptienne, à l’origine, pharaon est fils de Rê, dieu Soleil, qui disparaît chaque soir pour renaître chaque matin. La mythologie solaire et les tombeaux des pharaons sont les deux plus importantes références sacrées sous l’Ancien Empire.

D'après le dieu Rê dans sa barque, Livre des Portes, tombe de Ramsès Ier, fondateur de la XIXe dynastie, Vallée des Rois, Nouvel Empire, Égypte ancienne. (Marsailly/Blogostelle)
D’après le dieu Rê dans sa barque, Livre des Portes, tombe de Ramsès Ier, fondateur de la XIXe dynastie, Vallée des Rois, Nouvel Empire, Égypte ancienne. (Marsailly/Blogostelle)

Voir aussi l’article Le Sacré en Égypte ancienne, un dieu solaire aux multiples facettes

“Ce que mon cœur projette se réalise par mon bras”

Suite à une période troublée qui ébranle la société, la perception du divin évolue à l’époque du Moyen Empire. C’est davantage la vigueur et la détermination personnelle de pharaon que l’on met en lumière pour souligner la manifestation de sa divinité.

Je suis un roi qui parle et qui exécute, ce que mon cœur projette se réalise par mon bras, disent les textes… L’art, moins tourné vers de grandioses ambitions, exprime alors davantage d’humanité. Les artistes du Moyen Empire mettent l’accent sur la réflexion intérieure et l’attitude mesurée des personnages…

D'après Sesostris III coiffé de la couronne blanche de Haute Egypte, tête colossale, granit rouge, XIIe dynastie, temple Osiris, Abydos, Moyen Empire, Égypte ancienne. (Marsailly/Blogostelle)
D’après Sésostris III coiffé de la couronne blanche de Haute Egypte, tête colossale, granit rouge, XIIe dynastie, temple Osiris, Abydos, Moyen Empire, Égypte ancienne. (Marsailly/Blogostelle)

La mise en lumière du mythe d’Osiris, de la déesse Isis et de leur fils Horus dans le panthéon égyptien apporte une nouvelle dimension à la fonction royale. Ainsi, le pharaon régnant est à la fois fils de Rê et l’incarnation d’Horus, successeur du dieu roi mythique Osiris…

Voir aussi les articles Le Sacré en Égypte ancienne : Le mythe d’Osiris, de la déesse Isis et de leur fils Horus et Le culte d’Osiris, dieu de l’Au-delà et de l’Éternité, prend de l’ampleur au Moyen Empire

D'après Osiris recevant des offrandes du prêtre Padiamun, stèle votive, bois de cèdre peint, XXIe dynastie, Troisième période intermédiaire, Égypte ancienne. (Marsailly/Blogostelle)
D’après Osiris recevant des offrandes du prêtre Padiamun, stèle votive, bois de cèdre peint, XXIe dynastie, Troisième période intermédiaire, Égypte ancienne. (Marsailly/Blogostelle)

Face au monde, les pharaons affirment leur puissance

Plus tard encore, sous le Nouvel Empire, l’Égypte se retrouve confrontée à une influence grandissante venue des contrées orientales. Mais le phénomène cosmopolite de cette période favorise l’enrichissement culturel et artistique grâce à des inspirations venues de l’extérieur…

Les pharaons se lancent alors dans une stratégie d’expansion et de conquêtes… Face au monde, les rois égyptiens affirment et affichent leur pouvoir, leur force et leur autorité… En ce temps-là, on multiplie l’élévation de monuments sacrés spectaculaires le long du Nil, de Louxor et Karnak (Thèbes) jusqu’à Abou Simbel…

D'après les conventions respectées par les artistes de l’Égypte Ancienne, sur les reliefs, les gravures et les fresques peintes. (Marsailly/Blogostelle)
D’après les conventions respectées par les artistes de l’Égypte Ancienne, sur les reliefs, les gravures et les fresques peintes. (Marsailly/Blogostelle)

Les Textes des Pyramides lèvent le voile sur la culture mythique et spirituelle des anciens égyptiens. Le grand dieu Amon-Ré et la triade Isis-Osiris-Horus dominent un panthéon habité par de multiples déités locales ou plus universelles. L’art égyptien consacre le monde de l’au-delà et les artistes magnifient les tombeaux des pharaons et des puissants…

Article suivant : Égypte ancienne, les artistes illustrent des univers mythiques

Sommaire Égypte ancienne

Sommaire Égypte ancienne

EN BREF. Époque Thinite vers 3400-2980 avjc. Ancien Empire 2980-2475 avjc. Moyen Empire 2160-1788 avjc. Nouvel Empire 1580-1090 avjc. Troisième période intermédiaire 1090-663 avjc. Basse Époque 663 avjc – 332 avjc (domination Perse 525 avjc – conquête Alexandre le Grand 332 avjc). Époque ptolémaïque 332-30 avjc. Époque Romaine 30 avjc- IVe siècle.

Des écrits sacrés ? Les Textes des Pyramides, qui remontent à l’Ancien Empire (entre 2980 – 2475 avjc) ; Les Texte des Sarcophages, depuis la fin de l’Ancien Empire et au Moyen Empire (vers 2160 – 1788 avjc) ; Le Livre pour Sortir au Jour (dit Livre des Morts), au Nouvel Empire (vers 1580 – 1090 avjc) …

Un roman ? Sinouhé l’Égyptien, de Mika Waltari, les aventures de Sinouhé, médecin et espion du pharaon Aménophis IV (Akhénaton)… Un conte initiatique ? Her-Bak Pois Chiche, de Isha Schwaller de Lubicz, qui raconte l’éveil d’un jeune égyptien sous la XXe dynastie, dans la région de Thèbes (Karnak, Louxor)…

Publié par Maryse Marsailly

Blogostelle : Histoire de l'Art et du Sacré. Civilisations, chefs-d'œuvre, mythes, symboles..., tout un univers s'exprime dans les œuvres d'art.

3 commentaires sur « L’Art de l’Égypte ancienne. Les créations originales de Nagada et la lumineuse civilisation des pharaons »

  1. Bon Soir
    Merci pour ce partage… toujours aussi passionnant
    😉

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