Sur les traces de Lug, Le Lumineux…
Dans l’univers spirituel celtique, les relations des êtres humains avec les dieux de l’Autre Monde échappent aux normes du temps fini… Lors de la fête de Samain, le 1er novembre, on peut se rendre dans l’Autre Monde. Mais ceux qui y séjournent quelques heures ou quelques jours y demeurent en réalité plusieurs siècles. Ils ne peuvent plus revenir au temps profane sans en mourir. Pour l’âme celtique, l’Autre Monde, appelé le Sid, s’identifie à la fois à la Paix, à la Perfection et à l’Éternité…
Par Maryse Marsailly (@blogostelle)
– Mise à jour janvier 2019 –

Le Sanglier, emblème du dieu Lug, fait-il tourner la Roue de l’Univers? Comme Chakravartî fait tourner la roue cosmique dans les doctrines de l’Inde ancienne…
REPÈRES CHRONOLOGIQUES
L’âge de fer, 750 avjc à 52 avjc. Conquête de la Gaule par César, 52 avjc. L’époque gallo-romaine débute en 52 avjc. L’édit de Constantin, en 313, annonce le développement de la religion chrétienne… Chronologie générale L’art à l’âge du Fer
LE SID, ROYAUME DE FÉLICITÉ ET TERRE DES VIVANTS
La tradition irlandaise évoque l’Autre Monde nommé le Sid ; Tir na mBéo, la Terre des Vivants ; Tir na mBán, la Terre des Femmes ; ou encore Mag Meld, la Plaine des Plaisirs. La pensée spirituelle celtique semble se rattacher à un monde mythologique associé au chaudron miraculeux et à un lieu mythique d’éternité…

La croyance celtique en l’immortalité de l’âme
Dans le Sid, on est éternellement jeune, sans souffrance, sans maladie ni vieillesse. La littérature mythique raconte l’histoire de la jeune femme qui, dans son vaisseau de cristal, vient chercher un mortel à qui elle promet amour et félicité sans fin…
La croyance en l’immortalité de l’âme nourrit la pensée spirituelle celtique… Mais les interprétations varient selon les auteurs : pour certains, contrairement à d’autres, cette croyance ne s’accompagne pas nécessairement de métempsychose ou de réincarnation…
D’autres auteurs encore rattachent le thème de la métamorphose à la théorie métaphysique des états multiples de l’être : la puissance ou l’énergie spirituelle peut ainsi se manifester selon divers modes et selon différents plans de conscience…
D’après un dieu celtique coiffé de bois de cerf, qui brandit deux triskèles, phalère, or, Ier siècle avjc, La Tène, deuxième âge du Fer ; une figure fantastique, fibule, bronze, Slovenské Pravno, Slovaquie, vers 400 avjc, La Tène ; et un visage zoomorphe, bronze, style plastique, IIIe siècle avjc, mobilier funéraire, Orval, Manche, la Tène ancienne ; art Celte, âge du Fer. (Marsailly/Blogostelle)
Certaines étranges figures zoomorphes ou fantastiques des mobiliers funéraires de l’âge du Fer évoquent-elles le thème de la métamorphose ?
L’art de la métamorphose des dieux et des druides…
Dans la culture ancestrale celtique, les divinités sont étroitement associées au monde animal et ont le pouvoir de changer de forme. Ainsi, les dieux inspirent des symboles zoomorphes : ours, corbeau, sanglier, cerf, cygne…
La mythologie irlandaise évoque en particulier deux personnages capables de se métamorphoser en animal : Tuan mac Cairill, qui signifie Fils de Cairell et Fintan, qui a le sens de Blanc-Ancien.
Les récits racontent comment ces deux druides primordiaux vivent plusieurs millénaires… depuis l’époque du Déluge jusqu’à celle de saint Patrick et de ses successeurs… Tuan mac Cairill et Fintan transmettent ainsi la connaissance spirituelle et le savoir traditionnel de l’Irlande…
LUG, LE DIEU LUMINEUX DU PANTHÉON CELTIQUE
Inventeur de tous les arts, le dieu Lug ou Lugus serait, selon César, le Mercure Gaulois. Son nom signifie Lumineux. Dans la mythologie celtique, Lug apparaît comme une divinité primordiale et suprême du panthéon…

Le dieu Lug se rattache à la royauté légitime
Des légendes irlandaises et médiévales qualifient le dieu Lug de polytechnicien. Il est à la fois forgeron, bronzier, menuisier, parfois même cordonnier et médecin. Mais Lug arbore aussi les attributs d’un dieu du ciel ouranien, type déité céleste de l’orage…
Comme les dieux gréco-romains Zeus et Jupiter qui combattent des géants ou des titans, symboles des forces telluriques et dangereuses, le dieu druide Lug mène la bataille des dieux du ciel contre des êtres maléfiques. Victorieux, il s’empare du pouvoir royal et céleste. Lug légitime ainsi le principe de souveraineté…
Le grand dieu celtique Lug va laisser des traces en Gaule, où se trouvent de nombreuses forteresses de Lug, Lugu-dunum en latin. On rencontre également Lug ou Lugus en Irlande et au Pays de Galle, où il est nommé Lleu, c’est-à-dire à la main agile. Par ailleurs, l’équivalent gallois de Lug a laissé son souvenir dans des récits médiévaux très romancés…
D’après un dieu celte et sangliers, chaudron de Gundestrup, métal, Ier siècle avjc, Danemark, art Celte, âge du Fer ; et le dieu gaulois d’Euffigneix au sanglier, Ier avjc-IVe siècle apjc, Haute-Marne, Gaule Romaine (Marsailly/Blogostelle)
Sur le chaudron de Gundestrup, une divinité brandit deux personnages porteurs chacun d’un sanglier, emblème du dieu souverain Lug, un autre dieu brandit deux cerfs…
Sur les traces de Lug…, des lieux et des villes
En France, plusieurs endroits portent des noms qui renvoient au dieu Lug. Lyon, dans le Rhône ; Laon, dans l’Aisne ; Laudun, dans le Gard ; Loudun, dans la Vienne ; Loudon, dans la Sarthe ou encore, Leiden, au Pays-Bas… Le terme pluriel Lugoves, qui signifie les trois Lugus, apparaît dans deux inscriptions gallo-romaines, en Suisse et en Allemagne.
On rencontre aussi le terme Lugu-selva, qui signifie la propriété de Lug, dans une inscription à Périgueux. Quelques dérivés comme Lugurix, à Genouilly, dans le Cher, ou Lugius, à Narbonne, se rapportent à l’origine au dieu Lug. On trouve aussi ce nom en Grande-Bretagne dans Luguvallium, ancien nom de Carlisle…

Le dieu Lug au long bras
L’essentiel des témoignages celtiques au sujet de Lug provient de la littérature mythique irlandaise. À la tête du panthéon irlandais, le dieu Lug apparaît comme le chef de file des Túatha Dé Dánann, la tribu de la déesse Dana. Le récit mythique de Cath Maighe Tuireadh (ou Bataille de Moytura) raconte ses aventures…
La version la plus ancienne se trouve dans un manuscrit du XVe siècle, mais cette histoire très ancienne était connue déjà avant le Xe siècle. Lug cumule tous les savoir-faire et toutes les connaissances. On le qualifie de polytechnicien et on le surnomme dieu au long bras…
D’après le chaudron de Gundestrup, mythologie celtique, métal or et argent, Ier siècle avjc, Danemark, art Celte, âge du Fer et une enseigne guerrière, sanglier et Diane Chasseresse, bronze, Ier siècle avjc-Ier siècle apjc, La Tène, Gaule Romaine. (Marsailly/Blogostelle)
Lug terrasse Balor avec sa fronde…
Selon les récits mythologiques irlandais, le dieu Lug réunit à lui seul tous les pouvoirs et toutes les qualités divines des autres dieux. Par la puissance de sa magie, il assure la victoire sur les êtres maléfiques, les Fomoires, qui oppriment l’Irlande.
Lug est le père du héros Cuchulainn
Fils du Fomoire Delbaeth qui symbolise la forme indifférenciée et d’Eri, l’Irlande, Lug réussit à vaincre son grand-père Balor (l’éclair?). Le dieu Lug terrasse Balor d’un coup de pierre avec sa fronde…
Mais on présente également Lug comme le fils de Cian, qui signifie Lointain. Et Cian est lui-même le fils de Diancecht, dieu-médecin… Enfin, dans la littérature mythique, Lug est le père du grand héros de l’épopée d’Ulster, Cuchulainn…
LUG-WOTHAN-ODHIN ET L’ARBRE COSMIQUE
Dans la tradition irlandaise, en outre, une version ancienne donne à Lug un caractère obscur, sombre, vindicatif et violent. Ce profil est comparable à celui du dieu nordique Odhin. De son côté, l’auteur romain Tacite (Ier-IIe siècle apjc) mentionne la croyance des peuples germains en un dieu suprême…

Coiffée de bois de cerf, une mystérieuse déité a été assimilé au dieu celtique et gaulois Cernnunos. Il trône à l’image d’un Maître des animaux ou d’un Seigneur des Fauves. Un thème qui remonte par ailleurs à la Préhistoire et que l’on rencontre aussi dans l’Inde Ancienne et en Mésopotamie… Voir aussi les articles L’univers spirituel des chasseurs-cueilleurs Les sculpteurs et graveurs des cités de l’Indus et Des peuples néolithiques du Levant… au génie de Sumer
Dieu-héros et guerrier et dieu-magicien
Tacite explique que les peuples nordiques vénéraient avant tout Mercure et Mars, c’est-à-dire le Wothan germanique ou le dieu Odhin dans la mythologie scandinave. L’auteur latin mentionne aussi Tyr, dieu archaïque du ciel…
Mircea Eliade précise que Odhin-Wothan et Thôrr-Donar sont des dieux souverains, célestes et ouraniens. On retrouve le duo archaïque indo-européen du dieu souverain aux pouvoirs magiques et du dieu souverain guerrier et héros. Odhin-Wothan et Thôrr-Donar possèdent et incarnent pour les uns une puissance spirituelle souveraine et pour les autres une redoutable force physique…

Les nombreux attributs divins d’Odhin
Dans la mythologie germanique, Thôrr, comme Jupiter dans l’antiquité romaine ou le dieu védique Indra dans l’Inde ancienne, détient le rôle de dieu de l’orage et du combat. Il est à la fois le champion des dieux et l’archétype du héros guerrier…
De son côté, Odhin, impliqué également dans de nombreuses batailles, obtient la victoire grâce à sa magie. Parmi les nombreux attributs divins d’Odhin, on rencontre la capacité d’ubiquité, l’art de la métamorphose ou le pouvoir de paralyser son adversaire par la peur en le liant…
Le dieu nordique Odhin, divinité guerrière associée aussi à la magie, sacrifie l’un de ses yeux dans la fontaine de Mimir pour y puiser toujours plus de sagesse…
Runes et pouvoirs magiques
Odhin-Wothan évolue sur de multiples plans. Ce dieu nordique s’approprie les attributs des divinités agricoles et des divinités de la fécondité. Il devient également un dieu chthonien et funéraire, chef des âmes des héros défunts…
Odhin-Wothan apparaît comme le grand chaman qui reste suspendu à l’Arbre du monde, Yggdrasil, pendant neuf nuits. Il découvre ainsi les runes, l’art divinatoire et acquiert ses pouvoirs magiques. Ce scénario évoque un rite d’initiation chamanique, dont certains des récits racontent comment les chamans naissent dans les arbres…

Yggdrasil, Arbre Cosmique et Arbre de Vie
La mythologie nordique raconte comment Odhin attache son cheval à l’arbre Yggdrasil. Le nom de cet arbre signifie Le Cheval d’Odhin. If ou chêne, il symbolise le Cosmos et la Vie. Ses racines plongent au cœur de la Terre, dans le royaume des géants de l’Enfer.
Auprès de l’Arbre, jaillit la fontaine miraculeuse de Mimir, dont le nom se rapporte à la méditation et au souvenir. Le dieu Odhin laisse un œil en gage dans la fontaine, grâce à laquelle il se rafraîchit et vient puiser régulièrement davantage de sagesse…

Au pied d’Yggdrasil, les Nornes président au Destin…
Les récits mythiques racontent que non loin de l’arbre Yggdrazil se trouve également la fontaine Urd. C’est là que tous les jours les dieux tiennent conseil et dispensent la justice…
Les Nornes, qui tissent les fils du destin, règnent au pied d’Yggdrasil. Elles utilisent l’eau de cette fontaine pour arroser l’Arbre Sacré, lui redonner vigueur et jeunesse. Une chèvre, un aigle, un cerf et un écureuil veillent dans les branches d’Yggdrasil. Une vipère menace ses racines…
Le mythe du cycle cosmique
Lors du cataclysme annoncé par la Volüspa, c’est à dire la prédiction ou prophétie qui doit mettre fin au monde et instaurer une ère nouvelle, Yggdrasil sera fortement secoué… mais non abattu. Le tremblement de l’univers ne provoquera pas la destruction totale du Cosmos…
La lutte entre l’aigle d’Yggdrasil et le serpent (la vipère) trouve une correspondance dans la mythologie et l’iconographie de l’Inde ancienne avec le combat de l’aigle Garuda contre le reptile maléfique…

Le combat entre les ténèbres et la lumière
Oiseau mythique et céleste, parfois figuré sous une apparence humaine avec des ailes, on rencontre Garuda dans l’hindouisme et dans le bouddhisme. L’aigle Garuda est connu comme la monture de Vishnu…
Dans la lutte entre l’aigle d’Yggdrasil et le serpent, comme dans le combat du dieu germanique Thôrr contre le serpent de mer géant de Midgard, on retrouve le symbolisme cosmologique universel de la lutte entre la lumière et les ténèbres. Les deux grands principes solaire et ténébreux, souterrain (chthonien) s’opposent…

L’arbre Yggdrasil, un modèle universel et exemplaire
Le symbolisme de l’arbre se rattache à celui de la végétation. La végétation se révèle comme une hiérophanie : elle fait apparaître le divin… incarne et révèle le Sacré…
Un arbre ou une plante ne sont sacrés en tant que arbre ou plante. Ils le deviennent, nous explique Mircea Eliade, parce qu’ils participent à une réalité transcendante… et ils signifient cette réalité transcendante…
L’arbre Yggdrasil symbolise l’univers. Mais aux yeux de la foi archaïque ou ancestrale, n’importe quel chêne ou if peut devenir sacré s’il participe à ce même archétype. Un chêne ou un if quelconque peut symboliser l’arbre Yggdrasil, le modèle universel et exemplaire… Voir aussi l’article 3 L’Arbre de Vie, un concentré du Cosmos Vivant (dont l’arbre cosmique Yggdrasil)
Consacrer un lieu ou un arbre c’est l’acte de le dédier aux dieux
Pour les peuples d’Asie centrale, n’importe quel bouleau devient l’Arbre du monde par l’action de la consécration. Consacrer un lieu, un arbre ou un objet, c’est l’acte de le dédier aux dieux ou à dieu et de lui prodiguer un culte associé à des rituels…
Ainsi, en escaladant rituellement un arbre, le chaman s’élève à travers les cieux… Selon Mircea Eliade, dans la culture indo-européenne, la fusion symbolique de l’Arbre Cosmique et de l’Arbre de Vie sous la forme d’un Chêne remonterait jusque dans la préhistoire…

Selon Pline l’Ancien, les Druides sont les hommes de Chêne…
Le chêne symbolise la force et la longévité. Cet arbre, qui attire la foudre, symbolise aussi la puissance et la souveraineté suprême céleste. Selon l’écrivain romain Pline l’Ancien (Ier siècle apjc), les druides sont les hommes de Chêne. L’auteur se réfère à l’étymologie du mot grec Drûs, chêne, et à l’analogie avec le nom de druide…
… Pour les Celtes, le chêne est un arbre sacré
Le chêne celtique s’identifie à un temple naturel habité par des nymphes. Par ailleurs, la dimension spirituelle du chêne va perdurer dans le temps. Et c’est un mythe particulièrement élaboré dans le Nord de L’Europe.
L’iconographie sur le thème du chêne et de la feuille de chêne va inspirer des motifs décoratifs dans des temples, des cathédrales et sur des objets d’art… Et la tradition légendaire va attribuer au roi de France Saint Louis (Louis IX) l’habitude de rendre la justice sous le chêne de Vincennes… Voir aussi l’article 1 L‘arbre sacré, un symbole vivifiant.
DES DIEUX CELTES AUX ATTRIBUTS VARIÉS
Les divinités celtiques et gauloises possèdent plusieurs sortes d’attributs mythiques, comme le torque, la roue, le chaudron, la lance, la fronde, le foudre, la massue, la lyre, le lien ou l’attache, le fil ou la corde, le sanglier, le cerf, parfois la tige ou le crin…

Une divinité suprême fait tourner la roue de l’univers? Le décor du chaudron de Gundestrup évoque un univers mythologique peuplé de déités et d’animaux réels et mythiques…
Les dieux celtes et gaulois sont en premier lieu des dieux de l’Orage
À l’époque de la Gaule Romaine, les divinités celtiques perdurent ou bien sont mises en correspondance avec certains dieux du panthéon romain. Le dieu celte du Tonnerre, Taranis, pourvu de la roue, du foudre et de la corde est particulièrement populaire. La racine celtique de son nom, Taran, signifie tonner. En irlandais torann exprime le tonnerre.
D’après le dieu Taranis et sa Roue, pilier sculpté, bas-relief, Alsace, Ier-IV siècle apjc ; et le dieu gaulois Taranis, porteur de la roue, du foudre et de la corde, bronze, Ier siècle apjc ; France, Gaule Romaine. (Marsailly/Blogostelle)
Des dieux de l’orage et du Tonnerre…
Comme d’autres divinités reliées par leurs noms et par leurs cultes au chêne, Taranis possède un lien étroit avec cet arbre sacré qui attire la foudre… Chez les peuples indo-européens, le chêne personnifie à la fois l’Arbre Cosmique et l’Arbre de Vie, le Centre symbolique du monde. Taranis est également associé à certains oiseaux annonciateurs du temps, comme pour l’orage ou la venue du printemps…
Les déités celtiques et gauloises sont en premier lieu des dieux de l’orage. Ils contrôlent les saisons, apportent la pluie et assurent la fertilité. Ces divinités renvoient aussi à la hiérogamie ancestrale qui unit le dieu de l’Orage à la Grande Déesse de la fécondité, sous la forme de Grande Mère tellurique ou de Terre-Mère…

Les Mercure et les Apollon gaulois
Dans le monde gallo-romain, Mercure comme Apollon sont qualifiés de Atepo-marus, qui signifie à la grande protection. Ces dieux apparaissent comme deux divinités importantes du panthéon gallo-romain, à côté de divinités typiques de la tradition gauloise comme Taranis ou Toutatis. En grec et en latin, on invoque aussi Zeus-Sôter , dieu Sauveur ou Apollon-Medicus, dieu Médecin.
Ces différents qualificatifs mettent en lumière des spécialités divines interchangeables, et souvent partagée par diverses déités. En Gaule, rencontre encore Grannus qui évoque la première barbe, Joventus-Carus qui aime la jeunesse ou encore Belenus (ou Belenos)… Ces divinités renvoient au dieu solaire et lumineux Apollon en tant que divinité de la Jeunesse et des jeunes gens.

Les dieux solaires Grannus et Belenus
En gaule, on pratique le culte des dieux solaires Grannus et Belenus dans de nombreux endroits, mais il semble qu’ils ne désignent pas un seul et même dieu. Le nom de Belenus se rattache également à la connaissance des plantes médicinales. Ce dieu gaulois peut aussi être rapproché de l’Apollon-Médecin pour son savoir médical, un savoir attribué également au dieu romain Mercure (grec Hermès)…
Toutatis, Celui de la tribu
Le nom de Toutatis ou Teutates signifie Celui de la tribu. Il s’agit d’un terme générique qui peut être attribué à diverses divinités protectrices. Ce sont les dieux tutélaires d’une communauté ou d’un clan. Et certains dieux possèdent des épithètes ou des surnoms…

Peut-être des déités tribales ou tutélaires? La chevelure abondante et la barbe des personnages celtiques du chaudron de Gundestrup peuvent symboliser le pouvoir du chef, du héros ou du dieu…
Toutatis, dieu guerrier
L’emploi d’un surnom pourrait s’expliquer par la notion de tabou ou de dangerosité : on s’interdit de nommer le dieu par son nom véritable parce que ce nom est sacré, ou bien, il faut éviter que le nom du dieu soit connu par des ennemis qui pourraient l’invoquer… En Gaule Romaine, on rencontre souvent l’assimilation Toutatis-Mars-Teutates.
Toutatis est également un dieu guerrier… Le nom gaulois Teutates est mentionné dans La Pharsale du poète romain Lucain (Ier siècle apjc). Ce serait la variante ou une forme ancienne de touta-qui, dont le sens se rapporte à peuple, tribu, nation, et que l’on peut rapprocher du Túatha Dé Dánann, la Tribu de Dana, de la tradition irlandaise…

Sur le chaudron de Gundestrup, une déesse avec des seins ronds, accompagnée de rouelles fleuries et d’animaux évoque la fertilité, la fécondité et la végétation. Serait-elle aussi une Maîtresse des Animaux?
Brigantia chez les Brigantes
Parfois, il existe une correspondance entre le nom d’un peuple celte et le nom de son dieu tutélaire : le peuple des Brigantes de Grande-Bretagne honore ainsi Brigantia, qui signifie Éminence, Supériorité.
On retrouve un souvenir de cette divinité ancestrale en Irlande. Cette ancienne déesse celte des Arts et de la Poésie va devenir la patronne de l’Irlande. Sainte Brigide, mère abbesse de l’abbaye de Kildare, est fêtée le 2 février, au début du printemps…

Les Mères veillent à la naissance, à la vie et à la mort
En Gaule, les divinités féminines, Les Mères – ou Matres ou Matronnes – apparaissent comme secourables, mais surtout comme très puissantes. On peut les rapprocher des trois Parques romaines – Clotho, Lachésis, Atropos – qui président à la destinée des êtres humains en filant, dévidant et coupant le fil de la vie. Les Mères président à la naissance, à la vie et à la mort.
Appelées Les maîtresses en Italie du nord, Les Très Proches en Gaule Narbonnaise, Les Mères possèdent souvent un nom local pour les invoquer. Elles sont souvent personnalisées par une rivière, une montagne ou une source. Par exemple La Marne, Matrona est la Grande Mère, La Charente, Carantona est La Très Aimante…) Voir aussi les articles Un panthéon gaulois et romain en Gaule (1) et Un panthéon gaulois et romain en Gaule (2)

Épona, divinité féminine gauloise sur sa jument, renvoie à la fécondité, à la souveraineté, à l’intronisation royale, aux chevaux et aux cavaliers…
Épona, déesse gauloise
Le nom de cette déesse se rattache à Epo et à l’indo-européen Ekwo qui signifient Cheval. Elle est connue surtout grâce à ses représentations à cheval, en particulier en Rhénanie. Il semble que le cheval et les cavaliers soient des références culturelles significatives dans le monde indo-européen, celtique et Gaulois…
Par ailleurs, des contes gallois du Moyen-Age racontent comment Rhiamon, une reine injustement punie, sert de monture au premier venu. Épona comme Rhiamon sont des figures féminines rattachées aux mythes de souveraineté royale et aux rituels d’intronisation qui font souvent intervenir des chevaux… Mais Épona semble aussi renvoyer à la fertilité…

Un héritage celtique au-delà de la conquête romaine…
Il semble que dès l’époque du premier âge du Fer (Hallstatt ), puis au second âge du fer (la Tène), s’élabore déjà un panthéon, une mythologie et un rituel qui alimentent la source de la spiritualité celtique et gauloise…
Influencées dès le commencement par des thèmes sacrés qui remontent sans doute à la tradition indo-européenne et auxquels s’ajoutent des influences méditerranéennes, les croyances celtiques perdurent ensuite au-delà de la conquête romaine…
D’après un cheval, triskèle et hache, statère, Ier siècle avjc, Autun, peuple Eduens, La Tène ; et le chaudron de Gundestrup, métal, Ier siècle avjc, Danemark ; art Celte, âge du Fer. (Marsailly/Blogostelle)
Si l’ancestrale tradition des druides disparaît avec eux, l’âme celtique va survivre à l’époque de la Gaule Romaine dans les pratiques cultuelles… et bien plus tard encore dans la foisonnante littérature mythique du Moyen-âge, dont l’un des personnages les plus célèbres est le druide Merlin…
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Bloc-Notes + Who were the Celts? par Julia Farley, Curator European Iron Age collection, British Museum. (source British Museum : blog.britishmuseum.org/2015/10/13/who-were-the-celts/